Les grandes lignes du rapport de l’ASN (22 janvier 2012)
Que de progrès techniques accomplis et d’améliorations continues apportées en presque 20 ans sur des projets aussi complexes: évolution des matériaux, recherche de ratios avec une marge de sécurité importante, fruit d’un projet « raisonné « et raisonnable. Non, je ne vous parle pas de l’EPR mais du Trimaran « Banque Populaire V » , le plus grand trimaran de course océanique jamais construit au monde, «skippé » par Loïc Peyron, qui vient de battre le record du trophée Jules Verne, tour du monde réalisé en 45 jours alors que son frère Bruno Peyron avait mis 79 jours en 1993. Il en est ainsi, le progrès technologique nous trace de nouveaux horizons pour les bienfaits de l’humanité. Sécurité etsûreté étaient également au rendez-vous en ce début d’année avec le rapport sur les tests de résistance post-Fukushima. Dans ce domaine où la sûreté est, depuis toujours, une priorité pour tous les industriels français, on se doit de prendre en compte les évolutions technologiques et le retour d’expérience d’incidents ou d’accidents.
L’ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire) mentionne dans son rapport que « la poursuite de l’exploitation des centrales nécessite d’augmenter, dans les meilleurs délais, au-delà des marges de sûreté dont elles disposent déjà, leur robustesse face à des situations extrêmes ». Cependant les évaluations complémentaires de sûreté (ECS) réalisées par les exploitants n’ont pas révélé de failles, de défaillances majeures, et donc,
« Logiquement, ce qui était autorisé à fonctionner avant l’est aussi maintenant ». L’analyse des ECS démontrent que la sûreté de nos centrales est satisfaisante. Les améliorations proposées par l’ASN ne feront que renforcer la sûreté actuelle de celles-ci en France.
Jacques Repussard, directeur général de l’IRSN, a rappelé récemment dans une interview au Journal du Dimanche que « Le nucléaire, n’est pas une technologie parfaite » et qu’il se félicite de l’intérêt que portent les français à la question de la sûreté nucléaire. Vous trouverez ci-après une analyse de Francis Sorin, résumant les grandes lignes du rapport que vient de présenter M. Claude Lacoste, Président de l’ASN.
Nucléaire : c'est reparti pour 20 ans
Francis Sorin, journaliste scientifique, est responsable du Pôle Information de la Société Française d'Energie Nucléaire (SFEN)
Interview de Francis SORIN réalisée par l’Expansion le jeudi 05 Janvier 2012
Les
investissements de près de 50 milliards d'euros prévus pour le
nucléaire paraissent exorbitants. Le sont-ils vraiment quand il
s'agit en fait de prolonger de 20 ans l'énorme outil de production
d'électricité qu'est le parc français ?
Comment
analysez vous le
rapport
que vient de présenter M. Claude Lacoste, le président de l'ASN
?
Il
y a deux enseignements fondamentaux dans le rapport publié cette
semaine par l'Autorité de sûreté nucléaire.
-
D'abord, il ne préconise aucune fermeture de centrale, car il juge
que la sûreté de notre secteur nucléaire en France est
satisfaisante.
-
Ensuite, les investissements demandés par l'ASN, s'ajoutant à
d'autres déjà prévus, vont permettre de prolonger de 20 ans le
grand outil électrogène qui assure 75% de la production électrique
française.
Précisons
les choses. Les mesures que l'ASN préconise, et rend obligatoires,
ce sont pour l'essentiel les exploitants eux-mêmes qui les ont
proposées à la faveur des audits conduits lors des derniers mois.
Le travail de l'ASN a été de les examiner, de les compléter et
d'en effectuer la synthèse. Par ailleurs, EDF avait déjà prévu
d'importants investissements dans ses 58 réacteurs pour prolonger
leur fonctionnement au delà des 40 ans qui constituent leur
durée de vie théorique.
Donc
il y aura à la fois ces travaux complémentaires demandés par l'ASN
-et estimés par EDF à 10 milliards d'euros- et ces dépenses que
nous pouvons appeler « de jouvence » pour la rénovation
en profondeur des installations. Ces travaux se recoupent assez
largement, car les actions de rénovation ont souvent trait à la
sûreté.
Investissement
de sûreté + investissements de jouvence devraient se monter au
total entre 40 et 50 milliards d'euros. Ils vont ouvrir la voie à un
parc dont la durée de fonctionnement des réacteurs ne va plus être
40 ans, mais 20 ans de plus.
Le
parc actuel de centrales est presque amorti. Certains des
investissements nouveaux, dont ceux préconisés par l'ASN, seront
sur le court terme. Mais beaucoup dans les investissements de
rénovation sont à étaler sur plusieurs décennies, les centrales
n'ayant pas toutes atteint la limite d'âge.
Investir
de 40 à 50 milliards pour prolonger de 20 ans un parc aussi
puissant, c'est une somme qui est finalement assez réduite, faible,
tout à fait raisonnable si l'on considère la part du nucléaire
dans la production électrique nationale.
Quand
Greenpeace, ou Cécile Duflot disent que c'est de l'argent dépensé
à « fonds perdus », ils font, volontairement ou non,
une erreur patente de raisonnement économique. Car en fait,
pour EDF, faire cet investissement, c'est se ménager à très bon
compte 20 ans supplémentaires de production massive d'électricité.
C'est une très bonne opération !
Vous
considérez que le rapport de l'ASN confirme la sûreté des
centrales. Mais en même temps il impose 10 milliards de travaux. N'y
a-t-il pas un paradoxe ?
On
est dans le contexte de Fuskushima. Il a conduit tous les
responsables de sûreté en France et dans le monde à aller encore
plus loin pour faire face aux situations les plus improbables :
séisme d'ampleur considérable selon les critères français
conjugué à un tsunami, phénomène très hypothétique jamais vu
sur nos côtes.
Ce
sont des hypothèses nouvelles, tout à fait hors normes. Il y a
vraiment très peu de risques qu'elles se produisent. Mais l'approche
de sûreté post-Fukushima est de prendre malgré tout toutes
les dispositions pour faire face à cet improbable.
Dans
cette perspective, l'ASN a défini la notion de noyau dur. C'est
l'ensemble des moyens, déterminés pour chaque site, pour
maintenir les deux fluides essentiels au fonctionnement sûr d'une
installation nucléaire que sont l'eau et l'électricité. C'est
aussi la suggestion de mettre en place une force d'action
rapide nucléaire, capable d'intervenir très vite, y compris par
hélicoptère, sur un site accidenté et des mesures de
protection supplémentaires sous les sites certains équipements pour
protéger mieux les eaux souterraines et les nappes phréatiques.
Que
va-t-il se passer et quelles peuvent être les répercussions sur le
coût du kWh nucléaire?
L'ASN
ne dit pas à l'exploitant « fermez cette centrale ».
Elle dit : « voilà ce qu'il faut faire pour aller encore plus
loin dans la sûreté. A vous de décider : si vous le faites, tant
mieux; si vous ne le faites pas, on ferme ». Juger de
l'opportunité d'exécuter, ou non, les travaux demandés sera du
ressort de l'exploitant.
Aujourd'hui,
le coût de production du kWh nucléaire peut être établi à
environ 4,6 centimes d'euro. Il est vraisemblable que les dépenses
nouvelles vont se répercuter sur ce coût et le faire passer à 4,8
ou 4,9 ou même 5. Une hausse très restreinte qui va sans doute se
répercuter sur les factures mais de façon très limitée, de toute
évidence. Cela ne va absolument pas supprimer la compétitivité du
kWh nucléaire face aux autres énergies, énergies fossiles ou
énergie éolienne qui reste à plus de 8 centimes d'euro, sans
parler du solaire qui est 5 fois plus cher. Et même en cas de
hausse, faible, des factures dans la prochaine période, les tarifs
de l'électricité en France resteront très bas, inférieurs de
moitié, par exemple aux tarifs allemand ou italien et de 30% par
rapport à la moyenne européenne. Ainsi rénové et prolongé, le
nucléaire continuera d'être une très bonne affaire pour le
porte-monnaie des Français.
Source : L’Expansion Chaine Energie