Lancement de la centrale de Ohma (Japon)

(09-mai-2008)

 

 

Le 23 avril le gouvernement japonais  a délivré le permis de construire d’une nouvelle centrale nucléaire sur le site de Ohma, situé à l’extrême nord de l’ile de Honshu, la principale des iles japonaises. Ce site est peu éloigné du site de l’usine de retraitement de Rokkasho Mura dont les essais de démarrage doivent se terminer prochainement.

Ceux qui sont familiers des programmes japonais savent que le projet Ohma est une espèce d’ « arlésienne » locale, en effet le programme a traversé de nombreuses vicissitudes depuis une trentaine d’années, le type de réacteur ayant dû évoluer après l’abandon de la filière japonaise ATR au bénéfice d’un réacteur de type bouillant avancé (ABWR) développé en commun par GE, Hitachi et Toshiba), l’implantation exacte des bâtiments ayant été remise en cause du fait de contestations de la population locale et l’étude d’impact ayant dû être reprise à son tour. Le très sévère tremblement de terre de Niigata survenu le 16 juillet 2007 a bien sûr retardé lui aussi le processus administratif.

La décision  intervenue le 23 avril est intéressante à plus d’un titre : ce permis qui constitue la première autorisation de construire une nouvelle centrale nucléaire depuis 10 ans est délivré au terme d’un très rigoureux réexamen des normes sismiques applicables sans qu’il ait été nécessaire cependant d’attendre que toutes les conséquences du tremblement de terre de Niigata aient été tirées. En effet, en l’attente de l’achèvement des examens très approfondis des suites du séisme, aucun des 7 réacteurs de Kashiwazaki arrêtés au moment du séisme n’a encore été autorisé à  redémarrer.

Par ailleurs, et ceci a été un invariant tout au long des 30 années du projet, Ohma sera la première centrale conçue pour fonctionner avec un cœur dont tous les combustibles sont de type MOX, c'est-à-dire un mélange d’oxydes d’uranium (non enrichi) et de plutonium. Pour des raisons d’approvisionnement en MOX la centrale démarrera avec 1/3 de MOX seulement, proportion qui ira croissant au cours des rechargements successifs mais dès son démarrage la centrale sera dotée de tous les équipements spécifiques nécessaires pour le combustible MOX.

Propriété de la société J-Power dont ce sera la première centrale nucléaire, Ohma avec une puissance de 1383 MWe devrait être mise en exploitation à partir de 2012, la construction devant débuter dans quelques jours puisque tous les travaux préparatoires sont déjà effectués.

Ohma ne sera pas la première centrale japonaise à utiliser le combustible MOX, quatre autres électriciens japonais (Chubu, Kyushu, Shikoku et Kansai Electri Power Companies) ayant déjà commandé à AREVA de fabriquer à Mélox des combustibles pour différentes centrales (Hamaoka, Genkai, Ikata & Takahama). Elle ne sera pas non plus la première centrale à eau bouillante à utiliser des MOX, des centrales allemandes l’ont précédé et des centrales de Tokyo Electric y sont déjà préparées.

A noter que le MOX des BWR diffère peu des MOX des PWR, mais – comme dans les combustibles à l’uranium enrichi – les combustibles BWR comprennent une plus grande variété de teneurs en matière fissile que les combustibles PWR.

Il faut aussi souligner que le lancement très symbolique de ce réacteur 100% moxable intervient avant l’autorisation de lancement de la construction de l’usine J-Mox destinée à fabriquer les combustibles MOX à partir du plutonium extrait des combustibles retraités à l’usine de Rokkasho Mura. Le lancement de cette usine très comparable à l’usine française, à construire également sur le site de Rokkasho Mura,  devrait intervenir dès que les industriels auront définitivement arrêté les derniers choix en matière de technologie : en effet certains avocats de la technologie japonaise essaient encore d’introduire dans l’installation J-Mox quelques équipements développés au Japon.

Le calendrier exact d’approvisionnement du 1er cœur, celui de la montée en production de J-MOX et la proportion de MOX dans le 1er cœur détermineront si la fabrication du combustible sera confiée uniquement à J-Mox ou si l’usine française sera sollicitée.