UARCO : Union des Associations de Retraités de COGEMA

 

REMETTRE SUR LES RAILS N° 16

Octobre 2004

 

 

A chaque énergie sa place.

Mais n’ayons pas peur de l’énergie nucléaire !

 

 

 

SOMMAIRE

1.     La conjoncture, pour le nucléaire. 2

2.     Suggestions pour tenter de venir à bout des préjugés sur le nucléaire (suite) 6

2.1       Phrases simples pour expliquer le nucléaire et donner confiance. 6

2.2       Le transport de matières radioactives. 8

2.2.1        Plutonium provenant du démantèlement des armes. 9

2.2.2        Utilisation de ce plutonium sous forme de combustible Mox. 9

2.2.3        Nécessité de transporter le plutonium.. 10

2.2.4        Les acteurs américains et français sont convaincus de bien faire. 11

2.2.5        Les antinucléaires clament le contraire. 11

2.2.6        Discussion. 11

2.2.6.1     Bombe roulante. 12

2.2.6.2     Vol par des pirates. 12

2.2.6.3     Attaque à la roquette. 12

2.2.6.4     Chute d’un pont. Accidents. 13

2.2.6.5     Autre solution pour se débarrasser du plutonium militaire. 13

2.2.6.6     Pourquoi alors les « écologistes » s’opposent-ils à la solution Mox ?. 13

2.2.7        Les études de sûreté pour les transports de matières radioactives. 14

2.2.7.1     Le règlement de transport de l’AIEA.. 14

2.2.7.2     Etude de sûreté. 15

2.2.7.3     Etudes de sûreté sur le transport de plutonium américain. 15

3.     Remises sur les rails sur des sujets divers. 15

3.1       Une économie hydrogène ?. 15

3.2       Eoliennes. 16

3.3       Démantèlement, déconstruction. Déchets. 16

3.4       Canicule. 16

3.5       L’accident de Mihama au Japon. 17

3.6       Echecs juridiques des antinucléaires. 18

3.6.1        Rejet en Conseil d’Etat des requêtes écologistes sur l’extension de La Hague. 18

3.6.2        Condamnation de l’auteur et de l’éditeur du livre Tchernobyl : Aujourd’hui j’accuse, pour diffamation du Professeur Pellerin. 18

 

 

 

 

 

1.         La conjoncture, pour le nucléaire

 

« Un monde de brut ». Titre facile et tentant ! Libération l’a choisi pour un article le 6 août : Repousser les effets de la crise pétrolière passera forcément par l’apprentissage de la sobriété ; et un autre le 12 août. Un monde de brut à 50 dollars. Quelles conséquences  et quelles solutions si le prix continue à monter ? L’auteur du premier article est Yves Cochet ; par un « Soyons sérieux ! », il balaie, entre autre, le nucléaire comme solution possible dans cinquante ans. Le deuxième article ne mentionne même pas le nucléaire !

 

Le reste de la presse exprime en général un avis différent. Nous n’entrerons pas, bien sûr, dans le détail, mais partout on prend conscience du fait que les ressources en pétrole et en gaz sont limitées, et on ressent la vulnérabilité des approvisionnements. A propos du pétrole, La Croix du 6 juillet titre : Bientôt le compte à rebours. D’après The Times du 9 août, les prix de l’électricité (en Angleterre) pourraient bondir de 50% en deux ans. L’énergie nucléaire apparaît comme un élément majeur pour faire face à la raréfaction prochaine de ces matières premières, et aussi, naturellement, à l’augmentation de l’effet de serre avec ses conséquences sur le climat de la planète - puisque la production d’électricité nucléaire n’émet pratiquement pas de gaz à effet de serre (on commence à le savoir, mais répétez-le bien !).

 

Deuxième fait important : Il semble que la Russie doive bientôt, enfin ! se décider à ratifier le protocole de Kyoto[1]. Vladimir Poutine aurait annoncé son intention de le faire en échange du soutien de l’Union Européenne pour l’entrée de la Russie à l’Organisation Mondiale du Commerce (The Energy Daily le 5 août). « Les Russes … vont le ratifier », écrit Challenges le 26 août. « Ils y ont intérêt, car ils seront globalement vendeurs de droits d’émission[2] ». « Un projet de loi sur l’adoption du protocole doit être présenté aujourd’hui en Conseil des ministres », écrit Le Figaro le 30 septembre. Les conditions seront alors enfin remplies pour l’entrée en vigueur du protocole. Cela ne pourra qu’aider au développement de l’énergie nucléaire.

 

Les milieux de la finance, longtemps très réservés, lui reconnaissent enfin ces avantages considérables (par exemple, le Financial Times du 10 août) ; sans toutefois considérer que c’est la voie royale, vu que les gens continuent à se poser des questions, essentiellement quant aux déchets radioactifs ; le développement de l’énergie nucléaire est donc, on le sait bien, conditionné par son acceptation par le public.

Retour au sommaire

 

 

Venons-en aux nouvelles majeures dans quelques pays :

 

L’Inde (Nucleonics Week du 8 juillet) doit avoir, cet été, coulé le premier béton d’un réacteur prototype à neutrons rapides surgénérateur de 500 MWe[3], refroidi au sodium, deuxième phase de son programme qui en comprend trois. Le but de cette deuxième phase est d’aider à standardiser la conception des quatre réacteurs qui suivront, pour atteindre une capacité nucléaire de 20000 MWe vers 2020. En France, on a malheureusement fermé sans bonne raison Superphénix[4] : c’était la France qui menait le jeu dans cette filière, comme le rappelle un lecteur de La Voix du Nord le 1er septembre.

 

Au sujet de la Chine, nous disions dans notre numéro de juin quel programme considérable de construction de centrales nucléaires était annoncé : passer de 8700 à 36000 MWe d’ici 2020. Jusqu’à une date récente, les Chinois n’envisageaient pas de construire chez eux des réacteurs qui n’aient pas été déjà éprouvés ailleurs. Ils n’excluent plus aujourd’hui de commander des réacteurs de «3ème génération », tels que l’EPR[5]. A vrai dire, il semble que ce soit même l’EPR qui ait le vent en poupe ! Reuters écrit le 27 septembre :

Selon des sources industrielles, le gouvernement chinois pourrait lancer un appel d’offres par lots pour quatre premières centrales. Les attributaires pourraient être désignés rapidement. Areva, qui a déjà construit quatre des onze centrales chinoises seul et trois autres en partenariat, a de bonnes chances d’emporter des commandes pour les réacteurs.

Les centrales suivantes devraient être équipées du réacteur de nouvelle génération de type EPR. … Les autorités de Pékin n’ont pas encore donné d’indications sur le calendrier d’adoption de cette technologie.

On s’attend à des nouvelles plus officielles lors de la prochaine visite d’Etat en Chine du Président de la République.

 

Concernant les Etats-Unis, nous évoquions, dans notre numéro de juin, les efforts de nombreux « électriciens », s’associant en consortiums pour se préparer au grand jour : celui où l’un ou l’autre d’entre eux aurait à lancer la construction d’un réacteur nucléaire. Tout cela se poursuit. Il semble que John Kerry soit, lui aussi, favorable à l’énergie nucléaire.

 

Ce qui est nouveau ces derniers mois concerne le projet de stockage de déchets de haute activité et à vie longue à Yucca Mountain, dans le Nevada.

 

Tout d’abord une cour fédérale a jugé (New York Times du 23 juillet) que les exigences formulées par la National Academy of Sciences pour Yucca Mountain n’avaient pas été prises en compte convenablement dans les prescriptions de l’Agence fédérale de protection de l’environnement (EPA) : La National Academy of Sciences demandait au concepteur du stockage en profondeur (comme on le fait par exemple en France) de calculer à quel moment les éventuels habitants à la surface pourraient recevoir les doses les plus élevées, et de montrer que ces doses maximales seraient d’un niveau trop faible pour causer quelque effet néfaste que ce soit sur leur santé. Or l’EPA a limité à 10000 ans la période où devait être faite cette démonstration. La cour dit : ce n’est pas suffisant. Cette sentence risque, au mieux, de retarder l’ensemble du projet. Or le planning était serré pour commencer en 2010 à mettre en place des éléments combustibles usés. Le Nuclear Energy Institute[6] a fait connaître son intention d’attaquer cette décision auprès de la Cour Suprême (Sun Washington Bureau du 20 septembre).

 

L’autre élément majeur est que John Kerry, sensible aux protestations de l’état du Nevada, confirme son intention, s’il est élu, de bloquer le projet de Yucca Mountain ; et avant toute décision, de faire examiner tous les problèmes par des « peer reviews », revues par des pairs (Nucleonics Week du 12 août), jusqu’à ce que toutes les questions scientifiques en suspens aient trouvé une solution (Energy Daily du 4 août).

 

Une des questions qui, d’ailleurs, sont posées aux Etats-Unis, est de savoir si le pays va continuer à s’en tenir au dogme de Jimmy Carter, qui interdit le retraitement des combustibles usés[7]. Le sénateur républicain Pete Domenici, comme le font avec lui beaucoup de scientifiques, pousse à réfléchir à des cycles du combustible produisant moins de déchets, pour que Yucca Mountain soit moins vite saturé : cycles avec retraitement, éventuellement avec transmutation (Nuclear Fuel du 30 août).

 

Le Japon, comme la France, a toujours été favorable au retraitement et au recyclage du plutonium. Mais ce recyclage du plutonium au Japon, que ce soit dans des réacteurs à neutrons rapides ou dans les réacteurs à eau sous forme de Mox, n’a pas encore commencé : Le réacteur rapide de Monju a été arrêté en 1995] suite à une fuite de sodium sans dommage aux personnes, mais très mal gérée, avouée au public avec retard ; quant à l’utilisation du plutonium dans des combustibles Mox, elle n’est maintenant pas envisagée avant 2007 ; non pas que se posent des problèmes techniques ; mais divers évènements négatifs dont nous avons parlé dans nos numéros précédents font que la confiance fait défaut vis-à-vis du nucléaire dans ce pays et le projet Mox (appelé « pluthermal » au Japon) en fait les frais. Le dernier évènement est un grave accident non nucléaire dans la centrale nucléaire de Mihama, de la compagnie Kansaï Electric. Nous en parlons au paragraphe 3.5.

 

En Allemagne, le gouvernement, où les Grünen sont bien présents, n’a naturellement pas changé de position. Le ministre vert de l’environnement agit subtilement pour empêcher le stockage souterrain de déchets à Gorleben de voir le jour. Il affirme par ailleurs qu’il est impossible de construire une centrale nucléaire sans subvention de l’Etat (Frankfurter Rundschau du 31 juillet). Mais l’opposition CDU dit ouvertement qu’elle reviendra sur le processus de fermeture progressive des réacteurs, qui a fait l’objet d’un accord négocié par le gouvernement Schröder avec les industriels. Et les grands journaux en parlent : la Frankfurter Allgemeine du 2 septembre remarque : « les pays étrangers ne prennent pas exemple sur nous ». « L’Allemagne devra revoir sa position » (Handelsblatt du 17 août). « Une nouvelle puissance du rayonnement », titre die Zeit le 22 juillet.

 

En Belgique, le gouvernement, d’où les Ecolo ont disparu, va lancer une étude sur l’opportunité de revenir sur la décision, prise par le gouvernement précédent, de fermer les réacteurs nucléaires après 40 ans (L’Echo du 11 août, Le Soir du 2 septembre).

Retour au sommaire

 

Au Royaume-Uni, les choses évoluent aussi. The Guardian écrit le 7 juillet : « Tony Blair rallume le débat nucléaire », alors que la décision de ne pas construire de réacteurs nucléaires dans les cinq ans à venir (sauf nécessité nouvelle) ne remonte qu’à l’année dernière.

 

En France :

 

En Espagne, le gouvernement ne revient pas sur sa décision d’abandonner progressivement l’énergie nucléaire, a dit la ministre de l’environnement (AFP 10-8).

 

Terminons ce survol des nouvelles les plus significatives pour le nucléaire, avec quatre points qui ne se rapportent pas à un pays particulier :

 

Le Commissariat français à l’énergie atomique ouvrira en février 2005 à Marcoule un centre d’information grand public sur les déchets (Le Moniteur 23-7). Tout le monde ne sait pas que Marcoule est sans doute un des centres les plus avancés du monde quant au traitement des déchets. (Il organise des stages où viennent se former des ingénieurs du monde entier.)

 

Le Financial Times du 16 août a publié un petit article de M. Haug, Directeur général de Foratom, le forum atomique européen. M. Haug, parlant des déchets nucléaires, affirme : il existe des solutions, de très nombreuses études spécifiques pour un site donné de stockage sont en cours. Il conclut : il faut simultanément poursuivre ces études et construire de nouveaux réacteurs nucléaires, qui ne produisent pas de gaz à effet de serre !

 

Madame Loyola de Palacio, encore commissaire européen à l’énergie et aux transports, a fait le lien entre l’hydrogène et le développement de l’énergie nucléaire (Nucleonics Week du 1er juillet). Nous reprenons ce sujet de l’hydrogène au paragraphe 3.1 ci-dessous.

Retour au sommaire

 

Enfin, citons à nouveau James Lovelock, le grand écologiste pronucléaire dont nous parlions dans le numéro de juin. Nous disions dans notre numéro de juin qu’il avait sonné l’alarme, disant aux gens, aux hommes politiques : L’augmentation de l’effet de serre est très grave pour l’humanité, il n’est plus temps d’attendre pour lancer la construction de centrales nucléaires ! The Independent, à son tour, a publié deux articles de Lovelock, le 28 août et le 2 septembre. On lit dans le premier :I hope it is not too late for the world to emulate France (J’espère qu’il n’est pas trop tard pour que le monde prenne exemple sur la France.)[9]

Retour au sommaire

 

 

2.         Suggestions pour tenter de venir à bout des préjugés sur le nucléaire (suite)

 

Dans chaque numéro de Remettre sur les rails, chers lecteurs, nous vous proposons des réflexions pour vous aider dans vos conversations avec vos amis, votre famille, etc… Ces gens de bonne foi lisent la presse, écoutent et regardent des émissions sans toujours y trouver les éléments pour se faire une juste idée des choses. Par notre expérience collective, nous autres retraités du nucléaire - détachés de toute obligation vis-à-vis de nos anciens employeurs – essayons de vous les apporter.

 

Là où les gens se font le plus de soucis, et où vous avez sans doute le plus de questions, c’est sur la sûreté des réacteurs et des installations nucléaires en général, et sur les déchets radioactifs. C’est donc surtout sur ces thèmes que nous vous donnons le plus souvent des explications.

 

Cependant aujourd’hui l’actualité nous conduit à choisir un autre thème principal pour ce chapitre : la sûreté de certains transports de matières radioactives. Certaines organisations tentent de faire croire qu’ils présentent un danger : nous voulons parler des transports de plutonium. Nous vous dirons ce que nous en pensons.

 

Toutefois, avant d’aborder ce sujet, nous voudrions vous soumettre, en guise de rappels et pour rafraîchir vos souvenirs, quelques phrases simples qui sont des condensés de nombreux points abordés dans les derniers numéros de Remettre sur les rails.

Retour au sommaire

2.1  Phrases simples pour expliquer le nucléaire et donner confiance

 

Il est bon de résumer par des phrases simples, quand c’est possible, ce que nous avons développé plus longuement dans les numéros précédents. Elles restent plus facilement à l’esprit que les développements. En voici quelques unes. Chacune est un message.

 

L’Autorité de Sûreté, « gendarme du nucléaire », est

totalement indépendante des exploitants des installations industrielles.

Les 135 pays membres de l'Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA)

élaborent par consensus un ensemble de standards de sûreté de portée universelle, concernant les installations nucléaires, les transports, les déchets et la radioprotection.

Pour résoudre chaque problème, pour traiter chaque question,

vu le caractère vital de la sûreté dans le nucléaire, des mécanismes existent

pour recueillir les conseils des meilleurs experts internationaux.

En haut des tours de refroidissement des centrales, le grand panache n'est pas de la fumée, mais simplement de la vapeur d'eau propre qui se condense en nuage au contact de l'air frais!

 

Les réacteurs à neutrons rapides permettront de valoriser l’uranium 238, qui représente 99,3% de l’uranium, et d’alimenter ainsi le monde en énergie pendant des millénaires.

 

 

La radioactivité est une sorte d’instabilité physique de chaque atome radioactif,

qui se termine lorsqu’il émet son rayonnement et se désintègre.

Un atome radioactif est comme un cygne :

il n'émet de radioactivité – il ne chante – qu'un instant au moment de mourir.

Pour une sorte donnée d’atomes, l’activité dépend de leur « période[10] »,

expression mathématique de la durée de vie.

Pour les atomes à vie courte, beaucoup d’atomes se désintègrent en très peu de temps,

c'est la haute activité

(sauf, bien sûr, si ces atomes ne sont présents qu’en très petite quantité).

La même chose, dite à l’envers :

Une sorte d’atomes radioactifs qui émet fort (de haute activité)

ne peut pas émettre très longtemps.

Les atomes à vie très longue se désintègrent d'une façon beaucoup plus espacée,

ils ne peuvent avoir qu’une faible activité.

En mourant, en se désintégrant, l'atome radioactif devient un atome d'une sorte différente:

·          soit un atome radioactif, qui, un jour, se désintègrera à son tour,

·          soit un atome stable qui, lui, ne donnera plus de radioactivité.

Si un déchet est, à la fois, à (très) haute activité et à vie (très) longue,

c’est un mélange d’atomes radioactifs différents.

Les déchets radioactifs sont le plus souvent des mixtures d'atomes radioactifs différents, qu'on ne prend pas la peine de séparer parce qu'on n'en voit pas la nécessité.

Les volumes de déchets de haute activité initiale et à vie longue sont très faibles.

Des solutions techniques pour les déchets radioactifs, il y en a, il faut choisir parmi elles.

En matière de déchets, il n’y a pas de pire solution que d’attendre un utopique futur idéal.

En fonction des points de vue des gouvernants et de la population, et bien entendu, des sites disponibles, on met en œuvre pour les déchets des solutions différentes.

Les déchets radioactifs décroissent naturellement,

alors que beaucoup de déchets toxiques sont toxiques pour l'éternité[11].

Les déchets de haute activité initiale et à vie longue sont incorporés dans une matrice de verre, comme le plomb est incorporé dans le cristal : ils en sont des éléments constitutifs.

Et si le bloc de verre se cassait, les déchets ne seraient pas pour autant relâchés dans la nature, pas plus que le plomb ne s'échappe des deux morceaux d'un pauvre verre brisé!

Un stockage de déchets, c'est un ouvrage élaboré et robuste, conçu suivant la méthode du nucléaire, c'est-à-dire qu'on multiplie les impossibilités, les barrières indépendantes.

Pour stocker les déchets radioactifs, en principe pour toujours, on conçoit des ouvrages statiques, passifs, robustes, étudiés avec le plus grand soin en fonction des déchets et des lieux. Ces ouvrages sont faits de barrières successives et indépendantes.

Même les Japonais, chez qui les séismes sont rois, ont décidé de construire chez eux

un stockage géologique de déchets de haute activité initiale et à vie longue!

Les séismes intenses en surface n'ont qu'un effet minime en profondeur,

pourvu qu'on prenne certaines précautions[12].

La tectonique des plaques ne déplace les continents que de quelques kilomètres en un million d'années; pas assez pour passer d'une zone calme à une zone sismique.

On prévoit autour des colis de déchets des "barrières ouvragées" à base d'argile, matériau qui, si une faille venait à se former, se réparerait tout seul au contact de l'eau, de même que l’argile craquelée par la sécheresse reforme une couche étanche après la première pluie.

L’argile a la propriété de fixer de nombreuses impuretés, c’est pour cela que les eaux de source sont si pures ; de même, l’argile, dans un stockage de déchets, retiendrait des atomes radioactifs, les empêchant de progresser vers la surface de la Terre.

Du fait de l’absorption des rayonnements radioactifs par la matière, au-delà de quelques mètres des déchets d’un centre de stockage souterrain, il ne parvient plus aucun rayonnement provenant de ces déchets ; a fortiori, il n’en parvient aucun à la surface de la Terre.

Plusieurs réacteurs nucléaires naturels, spontanés[13], ont fonctionné à Oklo, au Gabon,

pendant des milliers d’années il y a deux milliards d’années.

On trouve dans la nature, par exemple à Oklo au Gabon, des "analogues naturels", c'est-à-dire des matières naturelles apportant des informations sur le comportement à très long terme des déchets que nous aurons à stocker.

Les déchets issus du retraitement des combustibles usés des clients étrangers sont ou seront retournés à ces clients.

 

 

La radioactivité, on ne la perçoit pas, mais on la mesure très finement,

à des niveaux de très loin inférieurs aux seuils dangereux pour l’homme.

La radioactivité naturelle omniprésente ne nous empêche pas de vivre en bonne santé,

même en certains lieux où elle atteint des sommets.

Ceux d'entre nous qui ne sont pas célibataires ont le bonheur de dormir avec une personne dont le corps rayonne environ 8000 Bq (becquerels)! Cela ne nous fait que du bien!

Lorsque la vie est apparue sur terre la radioactivité naturelle y était beaucoup plus intense qu'aujourd'hui. La vie serait-elle apparue sans radioactivité?

 

 

Pour les matières très radioactives, les emballages de transport (les récipients, leurs couvercles et leurs protections) doivent être agréés par les Autorités de Sûreté pour tous les pays où ils vont passer, avant de pouvoir être utilisés.

 

Ces phrases ne sont la propriété de personne. Vous serez les bienvenus à les diffuser le plus largement possible.

Retour au sommaire

2.2  Le transport de matières radioactives

 

L’actualité, disions-nous, conduit à évoquer le transport de matières radioactives, en particulier le transport de plutonium. Vous en entendez beaucoup parler. Quelles craintes sont exprimées et qu’en est-il ?

 

2.2.1        Plutonium provenant du démantèlement des armes

 

Certaines armes atomiques contiennent du plutonium. Les Etats-Unis et la Russie sont convenus d’en démanteler un assez grand nombre. Il en résulte que 34 tonnes de plutonium aux Etats-Unis et 34 tonnes en Russie attendent d’être écoulées pour devenir définitivement inoffensives.

 

2.2.2        Utilisation de ce plutonium sous forme de combustible Mox

 

Après de longues réflexions, les Etats-Unis ont résolu d’adopter la solution toujours préconisée par les Russes : utiliser ce plutonium pour fabriquer du combustible Mox[14] alimentant une centrale nucléaire, et produire ainsi de l’électricité.

 

Pour fabriquer du combustible Mox à partir de ces 34 tonnes, une usine doit être construite aux Etats-Unis. Cette usine devrait fonctionner 20 ans (Associated Press du 5 août) pour transformer les 34 tonnes de plutonium en combustible Mox. Elle utilisera le procédé mis en œuvre par COGEMA[15] dans ses usines de Cadarache et de Marcoule (« Melox[16] »).

 

L’affaire a l’air simple : ne suffit-il pas de refaire Melox en plus petit ? Elle est un peu compliquée par le fait que le plutonium utilisé pour fabriquer les armes n’est pas tout à fait le même que celui qui est mis en œuvre habituellement à Melox, provenant du retraitement des combustibles usés des réacteurs d’EDF et autres électriciens. C’est pourquoi les Américains se sont dit : avant de lancer la construction de l’usine de fabrication, il est prudent, comme on le fait dans le nucléaire pour tout nouveau combustible, de vérifier en vraie grandeur par irradiation dans un réacteur, que le comportement des assemblages combustibles Mox fabriqués avec ce plutonium des armes n’est pas différent du comportement des assemblages combustibles Mox courants, ceux qu’on utilise dans nos réacteurs depuis vingt ans[17].

 

Pourquoi n’est-ce pas tout à fait le même plutonium ? Une différence, relative à la physique neutronique, est que celui qui vient des armes ne contient – les militaires l’exigent – qu’une proportion faible d’atomes de plutonium au-delà du 239 : le combustible a été irradié peu de temps, le plutonium 239 qui se forme en premier n’a pas eu le temps de se transformer pour partie (sauf très faible) en plutonium 240, a fortiori 241[18]. Dans tous les cas[19], on a séparé, par retraitement, le plutonium du reste du combustible irradié, avant de s’en servir.

 

La matière qui sert à faire le combustible Mox : c’est une poudre d’oxyde de plutonium[20]. Il est possible que la poudre américaine soit aussi sur d’autres points quelque peu différente de la poudre habituelle fabriquée en France.

 

On va donc vérifier qu’il n’y a pas de surprise, en fabriquant, à partir d’un échantillon de la poudre américaine, quatre assemblages combustibles Mox, et en les irradiant quelque temps dans un réacteur. Oui, mais les Américains n’ont pas encore d’atelier pour fabriquer le combustible Mox pour cette vérification. C’est pourquoi ils en ont confié le soin à la France.

Retour au sommaire

2.2.3          Nécessité de transporter le plutonium

 

Il faut donc transporter 140 kilos de plutonium, sous forme de poudre d’oxyde de plutonium, des Etats-Unis en France, et les assemblages Mox, en retour, de France aux Etats-Unis. Dans le détail, cela veut dire :

·        un transport de poudre d’oxyde de plutonium aux Etats-Unis jusqu’à un port, un transport en bateau jusqu’à Cherbourg, sans doute un bref entreposage à La Hague, un transport par route de La Hague à Cadarache (Bouches du Rhône),

·        un transport par route de « pastilles »[21] de Cadarache à Marcoule (Melox),

·        un transport par route de quatre assemblages combustibles Mox[22] de Marcoule à Cherbourg, puis par bateau vers les Etats-Unis, et enfin par route vers le réacteur où ils seront irradiés pour produire de l’électricité.

 

On a vu que le plutonium provenant des armes est celui que préconisent les militaires ; on a l’habitude de dire « qualité militaire ». Il faut cette qualité pour que les militaires sachent fabriquer des engins fiables. Les spécialistes disent qu’il serait aussi possible de faire exploser des engins fabriqués avec du plutonium de « qualité réacteurs », tout en reconnaissant que cela présente toutes sortes de difficultés et donne de mauvais résultats. Cela veut dire qu’il faut protéger tout plutonium, et tout particulièrement le plutonium de qualité militaire. Des mesures de conditionnement et de protection doivent être prises, pour dissuader et empêcher tout vol de ces matières.

Retour au sommaire

 

Après cet exposé pour planter le décor, venons-en au débat entre ceux qui font et ceux qui critiquent !

 

2.2.4    Les acteurs américains et français sont convaincus de bien faire

 

Oui, les acteurs américains et français sont convaincus de bien faire :

Retour au sommaire

2.2.5        Les antinucléaires clament le contraire

 

Pour les antinucléaires tout cela est au contraire très mauvais !

Retour au sommaire

2.2.6          Discussion

 

Examinons ces points l’un après l’autre (en nous limitant à ce qui concerne les transports en France).

 

Avant de le faire, il faut expliquer que, dans le transport de plutonium, on a affaire a des semi-remorques, portant un conteneur rectangulaire semblable, vu de l’extérieur, à tous les conteneurs du monde, mais très sophistiqué à l’intérieur ; que ce conteneur contient un certain nombre de « colis de type B[26] » dont chacun répond (très largement) aux exigences formulées par le règlement international de l’AIEA. Chaque colis de type B contient de la poudre d’oxyde de plutonium.

Retour au sommaire

 

2.2.6.1       Bombe roulante

 

Une explosion (bombe) est absolument impossible. Vous pouvez expliquer que pour fabriquer une bombe atomique, il faut des dispositifs extrêmement complexes et sophistiqués : rien à voir avec un récipient rempli de poudre d’oxyde de plutonium ! Sinon, tous les pays sauraient faire une bombe atomique ! Quant à une réaction neutronique en chaîne, susceptible d’irradier des personnes comme à Tokaï Mura (mais sans explosion), elle n’a aucune chance de se produire. En effet, chaque colis de type B est très largement « sous-critique », c’est-à-dire qu’il n’est de très loin pas possible d’y déclencher une réaction en chaîne. Même en cas de choc, tel qu’un accident de chemin de fer à 140 km/h, ces emballages ne s’écraseraient pas au point qu’une quantité suffisante de plutonium se rassemble dans un volume permettant le déclenchement d’une telle réaction.

Retour au sommaire

2.2.6.2  Vol par des pirates

 

Chaque colis de type B a une masse de 1,5 tonne. Le conteneur, qui en contient un certain nombre, a une masse de 20 tonnes. L’ensemble routier remorque + conteneur a une masse de 40 tonnes.

 

Ni le conteneur, ni les colis de type B qu’il contient ne peuvent être ouverts en chemin. Ils sont protégés par de multiples sécurités qui ne sont naturellement pas dévoilées. Quelqu’un qui voudrait violer ces dispositifs l’apprendrait à ses dépens.

 

Il en est de même avec les assemblages Mox qui reviendront de Marcoule. Les colis de type B ont là une masse de près de 6 tonnes au lieu d’1,5 tonne pour l’oxyde de plutonium à l’aller !

 

Quant au piratage de l’ensemble d’un véhicule complet ou de sa remorque sur le trajet en France, vous n’aurez pas de peine à faire comprendre que, le convoi étant accompagné par les gendarmes et suivi par satellite, les pirates seraient facilement repérés. Ils ne pourraient, avec leur chargement, échapper aux forces de l’ordre, même si celles-ci ne sont pas toutes visibles.

Retour au sommaire

2.2.6.3  Attaque à la roquette

 

Les antinucléaires disent : Un tir terroriste à la roquette disperserait du plutonium dans la nature et tuerait de ce fait des milliers de gens ! Ils citent un rapport de l’IRSN[27].

 

Il faut savoir ce qu’a écrit l’IRSN, appui technique de l’Autorité de Sûreté Nucléaire française. Il a fait une expérience dans des conditions bien particulières : une charge creuse placée dans les circonstances les plus favorables, a certes percé une (une seule) boîte contenant l’oxyde de plutonium[28]. Mais on peut facilement expliquer que dans les conditions réelles d’un transport, un emballage, contenant un certain nombre de colis de type B, se trouve à l’intérieur du conteneur (qui ressemble, vu de l’extérieur, à tous les conteneurs du monde). Et ce conteneur d’une part constitue un obstacle interposé et d’autre part empêche un terroriste de voir les colis de type B pour les viser. De plus le terroriste ne saura pas à l’avance quel trajet suivra le convoi : c’est décidé au dernier moment ; ni l’heure à laquelle il se présentera à tel endroit.

Retour au sommaire

2.2.6.4       Chute d’un pont. Accidents

 

Nous avons abordé le sujet de la chute d’un pont dans deux numéros récents de Remettre sur les rails[29]. Si vous avez besoin de retrouver les explications que nous avons données à ce sujet, vous pouvez vous y référer.

 

Il est vrai que d’autres types d’accidents peuvent survenir. Nous parlons succinctement ci-dessous[30] des études de sûreté sur les emballages de transport de matières radioactives, études qui imposent aux colis de résister à des essais bien plus sévères que les accidents raisonnablement envisageables.

Retour au sommaire

2.2.6.5             Autre solution pour se débarrasser du plutonium militaire

 

Les antinucléaires prônent une autre solution que le Mox : « l’immobilisation dans des déchets vitrifiés ». L’idée est de mélanger le plutonium à des déchets vitrifiés de haute activité : césium et strontium essentiellement ; cette haute activité empêcherait physiquement des pirates de s’approcher.

 

Ce n’est pas une mauvaise idée, à cela près que les déchets, en raison de la décroissance radioactive naturelle du césium et du strontium[31], ne conservent pas leur très haute activité pendant des siècles. La protection que constitue ce rayonnement de haute activité disparaît assez vite. Les générations futures auraient donc à nouveau le problème de surveiller ces matières de qualité militaire ! C’est la raison pour laquelle les Etats-Unis ont finalement renoncé à cette solution. Les Russes ne l’ont même jamais envisagée. Au contraire le Mox élimine réellement le plutonium de qualité militaire (cf. ci-dessus, §2.2.4).

Retour au sommaire

2.2.6.6       Pourquoi alors les « écologistes » s’opposent-ils à la solution Mox ?

 

On a du mal à comprendre pourquoi les leaders « écologistes », vu l’objectif très noble de faire disparaître une matière qui pourrait être convoitée, et les conditions de sécurité réunies pour ces transports, pourquoi les leaders « écologistes » s’opposent ardemment à la réalisation de ce projet.

 

Cependant, on peut deviner une raison simple à comprendre : Le Mox est (avec le plutonium et le retraitement des combustibles usés) la bête noire des antinucléaires, car il valorise le plutonium. Ce faisant, il justifie le retraitement qui sera un jour indispensable pour alimenter les réacteurs à neutrons rapides qui sont la clef du développement durable par le nucléaire. Quand on ne veut pas de nucléaire à long terme, il faut s’opposer à l’usage du plutonium !

 

La ligne de conduite doit donc être de donner à penser que le transport de plutonium est dangereux malgré les précautions prises. On a vu des militants annoncer dans un certain détail les transports de plutonium (celui qui sort de l’usine de La Hague), décrire les véhicules, leur itinéraire, etc… !. C’est maintenant interdit. C’est pourquoi ces militants se contentent de suivre les véhicules pendant le transport, et de le raconter.

 

Il est vrai que les conteneurs transportant le plutonium peuvent être reconnus, bien qu’ils soient « banalisés » (par leurs dimensions identiques à celles des conteneurs utilisés pour toutes sortes de marchandises). Mais la sûreté des transports de plutonium repose sur de très nombreux autres éléments. Nous venons d’en évoquer quelques uns.

 

Parlons maintenant brièvement, d’une façon plus générale, des études de sûreté.

Retour au sommaire

 

2.2.7    Les études de sûreté pour les transports de matières radioactives

 

Nous allons voir que les études de sûreté ont pour base le règlement de transport de l’AIEA, l’Agence Internationale de l’Energie Atomique.

 

2.2.7.1 Le règlement de transport de l’AIEA

 

En 1959, l’ONU a confié à l’AIEA la responsabilité de développer les recommandations pour le transport des matières radioactives. Les documents successifs ainsi établis sous l’égide de l’AIEA ont été adoptés par l’ensemble des pays de la communauté internationale, sous le nom de « Règlement de Transport des Matières Radioactives »[32]. Ce qui est intéressant à expliquer ici, c’est que ce règlement prescrit en particulier à quels accidents codifiés, plus graves encore que les accidents vraisemblables, les emballages de transport doivent résister, et ce que veut dire « résister ». Cela signifie que les experts du monde entier ont réfléchi à ce qu’il est logique d’exiger des transporteurs dans tous les cas de figure qui peuvent se présenter. Et ils traduisent cela, après débat, dans ce règlement de l’AIEA (adopté par consensus[33]). Celui-ci sert de base aux règlements nationaux et internationaux pour chaque mode de transport, par exemple le trafic routier.

 

Tous les deux ans, le texte du règlement de l’AIEA est passé en revue par les pays, et d’éventuelles améliorations peuvent être discutées et adoptées, toujours sous l’égide de l’AIEA.

 

 

 

2.2.7.2 Etude de sûreté

 

Ensuite, c’est aux organisateurs des transports, lorsqu’ils veulent demander l’autorisation de les réaliser, de présenter aux autorités de sûreté concernées une « étude de sûreté » démontrant que les prescriptions du règlement de l’AIEA seront intégralement respectées. Et les autorités de sûreté, après étude, donnent ou non leur avis favorable. Il arrive assez souvent qu’elles demandent des précisions, ou un complément d’étude. Quelquefois elles demandent une modification du projet. Ce n’est qu’après leur approbation qu’est donnée l’autorisation de transport.

 

2.2.7.3  Etudes de sûreté sur le transport de plutonium américain

 

Pour toute l’affaire de la fabrication en France des assemblages Mox destinés à vérifier le comportement de ce combustible dans les réacteurs américains, les études de sûreté ont été présentées aux autorités de sûreté américaines et françaises, et approuvées par elles. Ceci vaut pour le transport et pour tous les éléments de la fabrication.

 

Vous voyez que vous avez tous les éléments pour rassurer vos interlocuteurs s’ils sont un tant soit peu inquiets devant le déploiement d’affirmations péremptoires des antinucléaires !

Retour au sommaire

 

3.         Remises sur les rails sur des sujets divers

 

3.1       Une économie hydrogène ?

 

Le Financial Times du 11 août publie un article très intéressant, intitulé : Un rêve d’une économie hydrogène. Si l’on résume, il dit : si l’hydrogène doit un jour servir de combustible à la place des combustibles fossiles, il y a encore des percées technologiques majeures à faire pour y parvenir, et même alors, ce ne sera pas si facile. Tout cela est vrai.

 

Ce qui est curieux, c’est que cet article parle bien de la difficulté de produire l’hydrogène à bas prix, mais pas une seule fois il ne parle de l’énergie nécessaire pour couper la molécule d’eau, la matière première, pour séparer l’hydrogène de l’oxygène. Et pas une seule fois l’article ne parle d’utiliser l’énergie nucléaire, alors que c’est sans doute une des meilleures idées, avec des réacteurs à haute température. Il parle d’algues, de biomasse avec de la lumière et des catalyseurs, mais pas une seule fois le mot énergie n’est écrit.

 

Madame de Palacio, commissaire européen à l’énergie et aux transports, a, elle, abordé le sujet à Paris à la troisième conférence parlementaire sur l’énergie nucléaire. Evoquant des études en cours, elle a expliqué l’importance de l’énergie nucléaire dans le développement d’une économie hydrogène (Nucleonics Week du 1er juillet).

 

En tout cas, les Etats-Unis se sont lancés dans un immense programme de recherches tous azimuts pour arriver à produire et utiliser l’hydrogène. Le Président Bush a dit, dans son adresse de janvier 2003 sur l’état de l’Union, que l’objectif était qu’un enfant né ce jour-là ait comme première voiture une voiture à hydrogène ! Il est envisagé (Nucleonics Week du 8 juillet) de construire un réacteur pilote à haute température qui fonctionnerait en 2020, pour produire non seulement de l’électricité, mais de l’hydrogène. Bien que le réacteur pilote envisagé par le Department of Energy soit d’une puissance inférieure à celle du réacteur de référence VHTR[34] auquel travaille Framatome-ANP, Areva s’est mise sur les rangs.

Retour au sommaire

3.2       Eoliennes

 

Dans le numéro de juin de Remettre sur les rails (n°15, §3.3), nous avons parlé d’une deuxième chute d’éolienne, à Dunkerque. Un lecteur nous a fait remarquer que nous avions fait une petite erreur en disant que les neuf machines dont l’une était tombée n’étaient plus exploitées. Si, elles l’étaient encore. Nous avons corrigé cette erreur dans le texte électronique qui a été adressé aux médias et placé sur notre site Internet, http://www.uarco-france.com.

 

L’autre chose intéressante à dire sur les éoliennes est que, dans la loi d’orientation sur l’énergie, le Sénat a corrigé la version adoptée par l’Assemblée en première lecture : l’avis de la commission des sites, perspectives et paysages ne sera demandé qu’à titre consultatif. Nous avions raison d’écrire en juin : « On n’en est qu’à la première lecture à l’Assemblée, les choses peuvent encore changer » !

Retour au sommaire

3.3       Démantèlement, déconstruction. Déchets

 

Nous avons parlé assez longuement, dans notre numéro de juin, du fait que le coût de gestion des déchets, et le coût du futur démantèlement des installations nucléaires, étaient payés à l’avance par les clients des kilowattheures électriques, permettant aux entreprises concernées de constituer des provisions (alors que tant de fois on entend dire que ces coûts seront à la charge des générations futures). Il suffit alors de placer cet argent en bon père de famille pour disposer le jour venu des fonds nécessaires. Chaque prestataire de services facture à son client une quote-part des provisions qu’il doit constituer pour réunir progressivement ces fonds (Remettre sur les rails n° 15, §2.5).

 

La Tribune du 12 juillet donne un chiffre pour les provisions pour démantèlement, fourni par Gilles Zask, en charge de ce programme chez EDF. Pour les 58 centrales REP[35], qui devraient encore fonctionner une vingtaine d’années, l’addition se chiffre à 17 milliards d’euros, dont 7 sont déjà réunis. Il faut que les 10 milliards restants, valeur 2004, soient réunis d’ici la fin de la vie des réacteurs.

Retour au sommaire

3.4              Canicule

 

Nous n’avons pas eu de canicule en France cet été, mais tant de choses ont été dites l’an dernier qu’il est intéressant d’apporter les précisions suivantes :

Retour au sommaire

3.5              L’accident de Mihama au Japon

 

Un grave accident s’est produit à la centrale de Mihama au Japon. Cinq morts et des blessés. Une partie de la presse réagit, au Japon et dans le monde, en imputant cet accident aux dangers du nucléaire.

 

Il est indéniable que c’est la société, Kansaï Electric, et ses exploitants sur le site, qui portent la responsabilité d’éviter les accidents, de faire en temps utile les contrôles nécessaires pour entretenir convenablement les installations. Mais il ne s’agit nullement d’un accident nucléaire : c’est une canalisation d’eau sous pression (9 bars) à 140°C qui a sauté ; une canalisation d’eau non radioactive, sur le circuit dit « secondaire ». L’épaisseur de métal à l’origine devait être d’un centimètre. Le minimum admissible est de 4,7 millimètres. On a mesuré 1,4 millimètre à l’endroit de la rupture. On n’avait jamais contrôlé l’épaisseur du métal par ultrasons ! Sans doute ne s’attendait-on pas à une réduction d’épaisseur par corrosion ou érosion à cet endroit-là. Il y a des canalisations semblables dans les centrales non nucléaires. Et comme toutes les installations d’eau sous pression, elles peuvent donner lieu à des accidents. La France a une agence spécialement consacrée à cette surveillance, l’APAVE.

 

Le METI[37] a bien réagi en prescrivant que non seulement les centrales nucléaires (Kansaï en a onze), mais les centrales « thermiques », brûlant du combustible fossile, contrôlent les canalisations de ce type (NikkeinetInteractive du 11 août).

 

Cet accident ne changera sans doute pas la politique énergétique du pays, mais cela fait un handicap de plus, car pour la population tout cela concerne le nucléaire, et elle perd confiance. Il faut du temps aux autorités provinciales, après chacun de ces évènements, pour expliquer et tenter de rassurer, avant de poursuivre le développement du programme nucléaire. Le chargement des premiers combustibles Mox, prévu en 2007, sera-t-il encore reporté ?

 

La presse mondiale rappelle naturellement tous ces évènements antérieurs survenus au Japon. Libération du 10 août, au sujet de l’accident de criticité de Tokaï Mura le 30 septembre 1999, donne des chiffres aberrants :

Retour au sommaire

3.6              Echecs juridiques des antinucléaires

 

3.6.1        Rejet en Conseil d’Etat des requêtes écologistes sur l’extension de La Hague

 

Suivant un communiqué de l’ AFP le 28 juillet, le Conseil d’Etat a rejeté … les requêtes de plusieurs associations écologistes contre l’extension d’une des installations du site de retraitement de la Cogema à La Hague … Greenpeace, le Crilan (Comité de réflexion, d’information et de lutte antinucléaire) et le réseau Sortir du Nucléaire avaient demandé l’annulation d’un décret du 10 janvier 2003 autorisant la … Cogema à modifier son installation de traitement des effluents…, dans le cadre d’une extension de capacité.

 

3.6.2    Condamnation de l’auteur et de l’éditeur du livre Tchernobyl : Aujourd’hui j’accuse, pour diffamation du Professeur Pellerin[38]

 

Après avoir été condamnés en première instance en 2003, en appel le 18 mars 2004, M. Jacquemin et son éditeur ont été condamnés en cassation le 22 septembre pour avoir diffamé le Professeur Pellerin.

 

Il en avait été de même pour Noël Mamère et Antenne 2 (jugement en cassation le 22 octobre 2002). D’ailleurs avant cela, Michèle Rivasi, sa collègue, Madame Crié, et leur éditeur avaient échappé à la condamnation car à l’époque, le Professeur Pellerin, inexpérimenté sur ces questions juridiques, s’était trompé d’instance pour déposer sa plainte. Le tribunal s’était déclaré incompétent, mais avait déjà reconnu la diffamation.

Retour au sommaire



[1] Les pays signataires s’engagent à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre d’un certain pourcentage, entre l’année de référence, 1990, et la période 2008-2012. L’engagement de réduction est de 7% pour les Etats-Unis, de 5,5% pour la Russie, de 8% pour l’Union Européenne. Celle-ci a différencié les engagements et la France, parce qu’elle avait déjà remarquablement réduit ses émissions avec ses réacteurs nucléaires, doit seulement stabiliser (réduction zéro) ses émissions. Ni les Etats-Unis, ni la Russie n’ont ratifié le protocole. Les conditions ne sont ainsi pas remplies pour qu’il entre en vigueur. Elles le deviendront si la Russie ratifie.

[2] Un système en quelque sorte commercial permet aux pays, et même aux entreprises, d’acheter des droits d’émettre des gaz à effet de serre s’ils ne parviennent pas à réduire suffisamment leurs émissions, ou inversement, de vendre des droits d’en émettre s’ils réussissent à réduire leurs émissions davantage que leurs engagements. Ce système a pour but de privilégier la réduction des émissions là où cette réduction coûte le moins cher. Le problème des gaz à effet de serre étant planétaire, ce mécanisme permet une réduction maximale des émissions pour des moyens financiers donnés.

[3] 500 MWe se dit 500 mégawatts électriques, soit 500 000 kilowatts.

[4] réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium, de 1200 MWe

[5] EPR : European Pressurised water Reactor : mis au point conjointement par Framatome et Siemens, aujourd’hui réunis dans Framatome ANP.

[6] NEI : groupe de « lobbying » regroupant les industriels de l’énergie nucléaire

[7] Carter croyait que retraiter les combustibles usés, en séparer le plutonium, rendrait plus facile le vol de cette matière. Il fallait donc, d’après lui, considérer l’élément combustible usé comme un déchet et le mettre hors de la portée des hommes dans un stockage géologique souterrain. On peut dire au contraire que le recyclage du plutonium séparé par retraitement, dans le combustible d’un réacteur, permet de casser, fissionner, une grande partie des atomes de plutonium, donc de les faire disparaître.

[8] Melox fabrique les combustibles à oxyde mixte uranium et plutonium, Mox, pour les réacteurs à eau pressurisée ou bouillante.

[9] Certains antinucléaires ont affirmé, en se moquant, qu’en prenant maintenant la plume, James Lovelock avait tout d’un coup retourné sa veste. C’est tout à fait faux : depuis très longtemps il milite pour l’énergie nucléaire. C’est lui, par exemple, qui a écrit la préface du livre de Bruno Comby dans sa version anglaise : Environmentalists For Nuclear Energy. Il est membre actif de l’AEPN, Association des Ecologistes Pour le Nucléaire.

[10] Dans les programmes scolaires, on parle souvent de « demi-vie », synonyme de période.

[11] mercure, plomb, ypérite, etc

[12] Il faut construire le stockage à une distance suffisante des discontinuités géologiques.

[13] On en a dénombré seize.

[14] Mox veut dire mélange d’oxydes: d’uranium et de plutonium

[15] Le Département (ministère) de l’Energie américain a lancé un appel d’offres qui a été gagné par le consortium, Duke, COGEMA, Stone & Webster (DCS). L’expérience de COGEMA avec le procédé d’une part, l’usine Melox d’autre part et l’excellent comportement sous irradiation de ces assemblages combustibles, constituaient une remarquable référence.

[16] qui produit les « assemblages combustibles » Mox pour les réacteurs à eau, pressurisée ou bouillante, qui nous alimentent en électricité (nous dirons « réacteurs électrogènes »)

[17] en Belgique, en France, en Allemagne et en Suisse

[18] Le plutonium se forme au cours de l’irradiation du combustible dans des réacteurs nucléaires à partir de l’uranium 238. Tandis que les atomes d’uranium 235 peuvent se « fissionner » sous l’impact d’un neutron (et dégager alors la chaleur qui sert à produire l’électricité), les atomes d’uranium 238 ne le peuvent pas, du moins dans les réacteurs à neutrons thermiques ; mais certains d’entre eux capturent un neutron et deviennent des atomes de plutonium 239. Un atome de plutonium 239 peut, soit se fissionner et produire alors de l’énergie, soit à son tour capturer un neutron et devenir plutonium 240, de même un 240 peut capturer un neutron et devenir du plutonium 241, et le plutonium 241 peut devenir du 242, tout ceci d’autant plus que l’irradiation se prolonge ; ces divers plutoniums, chimiquement identiques, mais physiquement très différents du point de vue nucléaire, sont présents ensemble dans les combustibles usés.

[19] après une irradiation longue pour les éléments combustibles des réacteurs à eau, retraités à La Hague ;

après une irradiation courte dans certains types de réacteurs quand il s’agit de plutonium pour les militaires. Bien entendu, on ne nous dit pas sous quelle forme ils mettent ce plutonium pour en faire des bombes, et, quand ils ont démantelé celles-ci, comment ils ont fait la poudre d’oxyde de plutonium.

[20] qu’on mélangera à une poudre d’oxyde d’uranium

[21] Une pastille est un petit cylindre très solide en oxyde mixte d’uranium et de plutonium, prêt à être introduit dans les tubes d’alliage de zirconium qui vont ensuite être assemblés pour constituer un assemblage combustible.

[22] La totalité des 140 kg de plutonium sera retournée aux Etats-Unis. Les quatre assemblages à fabriquer contiendront moins que 140 kg. Les résidus, poudre, rebuts, …, seront comprimés en forme de pastilles et retournés dans des gaines pareilles à celles qui sont utilisées pour les assemblages. Ces résidus seront appelés « crayons Mox hors spécification » (Nuclear Fuel du 27 septembre). On notera que Dominique Voynet est la seule, à notre connaissance, à avoir déclaré à la presse (Europe 1 le 27 septembre, Le grand rendez-vous de Jean-Pierre Elkabbach) : « … c’est à peine 1% du volume des déchets qui sont arrivés qui vont être retournés aux Etats-Unis. » … « Nous allons garder 99% des déchets. » Elle croit que nous recevons des déchets à retraiter, alors qu’il s’agit de poudre d’oxyde de plutonium contenant 140 kilos de plutonium !

[23] D’ailleurs, naturellement, tout ce qui est en train de se faire a été approuvé par les autorités de sûreté des pays concernés.

[24] et même depuis 40 ans qu’on fait et transporte des combustibles expérimentaux au plutonium.

[25] Agence Internationale de l’Energie Atomique

[26] Le colis de type B est composé de l’« emballage » - qui comprend le récipient, ses couvercles et diverses protections - et son contenu à transporter.

[27] Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire

[28] Les boîtes contenant la poudre d’oxyde sont serties, empilées dans des « chaussettes » soudées, elles-mêmes placées dans un étui, lui-même placé dans l’emballage de type B. Cela fait quatre barrières étanches.

On notera que l’ensemble de l’étude de sûreté a été fait en supposant l’oxyde de plutonium placé en vrac dans l’emballage de type B, c’est-à-dire sans accorder de valeur à ces trois barrières supplémentaires, parce qu’il n’est pas facile de quantifier la protection supplémentaire qu’elles apportent.

[29] en particulier, n° 14, § 4.3. Nous rappelons à ceux qui peuvent accéder à Internet qu’ils peuvent trouver Remettre sur les rails (à partir du numéro 10) sur le site www.uarco-france.com.

[30] au paragraphe 2.2.7

[31] leur période est de 30 ans ; au bout de 300 ans, leur activité résiduelle est inférieure au millième de l’activité d’origine.

[32] Les « standards de sûreté » de l’AIEA sont seulement des recommandations. Mais les pays peuvent les intégrer tels quels dans leur réglementation nationale, ce qui rend leur application obligatoire. Pour les transports, tous les pays ont décidé de le faire, d’où le nom de « règlement ».

[33] Il est aussi intéressant de faire observer à vos interlocuteurs que, parmi ces pays qui ont élaboré le règlement, la très grande majorité n’ont ni l’arme atomique, ni centrales nucléaires et ne défendent donc aucun intérêt économique. Ils ont eu comme principal souci, dans la discussion des textes avant leur adoption, de veiller à ce que les activités de ceux qui ont l’arme atomique ou des centrales nucléaires ne risquent pas de leur porter préjudice suite à d’éventuels accidents.

[34] VHTR: Very High Temperature Reactor

[35] REP : Réacteurs à eau pressurisée. Il ne faudrait pas dire 58 centrales, mais 58 réacteurs.

[36] En physique, la quantité de chaleur retirée par l’évaporation s’appelle la chaleur latente de vaporisation.

[37] Ministry of Economy, Trade and Industry

[38] Le Professeur Pellerin était, lors de l’accident de Tchernobyl, le chef du Service Central de Protection contre les Rayonnements Ionisants, SCPRI : la personne et l’organisme au monde sans doute les plus compétents, en raison de leur équipement et de leurs activités antérieures, pour apprécier les effets sur l’homme des retombées radioactives, provenant soit d’explosions nucléaires militaires, soit d’accidents. Le Professeur Pellerin n’a pas du tout, comme on l’a dit, déclaré que le nuage de Tchernobyl s’était arrêté à la frontière. Il a au contraire annoncé avant tout le monde – et la presse a diffusé la nouvelle - que le nuage avait traversé la France de part en part ; mais il a indiqué qu’il n’y avait pas lieu de modifier les habitudes alimentaires dans notre pays.