Vers une électricité durable. Propre, sans CO2, disponible, abondante en permanence
Contact Connexion adhérent Comment adhérer
Idée reçue sur les oeufs et le panier

Il ne faut jamais mettre tous

ses oeufs dans le même panier :

Fessenheim : deux oeufs cassés sans raison

 

Enquête : le nucléaire coupable idéal … les « œufs » et le « panier »
Énergie électro-nucléaire : en 2015, la Loi de Transition Énergétique pour une Croissance Verte (LTECV-2015) a prévu que la part d’électricité électro-nucléaire, qui assurait environ 75 % de la production d’énergie électrique de la France depuis des décennies, devait être réduite à 50 % à l’horizon 2025.
Puissance électro-nucléaire : la même LTECV-2015 prévoyait aussi un plafonnement de la puissance nucléaire installée à 63,2 gigawatts (en 2015, ces 63,2 gigawatts ne représentaient déjà que 48 % des 130 gigawatts de la puissance électrique totale des moyens de production du pays, mais produisait 75 % de l’énergie électrique).
Aucune étude technique, économique ni environnementale ne fut menée pour justifier ce chiffre « magique » de 50 % (pourquoi pas 40 % ou 90% !?), pour la bonne raison que le Président de l’époque avait choisi d’imposer ce sacrifice au pays en contrepartie d’un accord électoral qui lui avait permis en 2012 d’ « acheter » des voix écologistes, qui lui ont d’ailleurs permis d’être élu. Une sorte de paiement différé très astucieux, hors comptes de campagne, prélevé après coup dans la poche des consommateurs qui ont vu leurs factures augmenter de près de 50 % pour financer les moyens de production soi-disant « renouvelables » qu’il a fallu créer de toutes pièces et dans l’urgence pour tenter de compenser la perte de production nucléaire.
Comme cette réduction à 50 % représentait de considérables inconvénients écologiques, économiques et sociaux ainsi qu’une grave dégradation de notre indépendance énergétique et de notre balance commerciale, il a fallu trouver un motif recevable par l’opinion publique et les contribuables.
Ce motif, repris depuis 2015 par tou(te)s les Ministres de l’Énergie et de l’Environnement sans exception, et complaisamment relayé par les médias, fut en substance le suivant :
Il ne faut jamais mettre tous ses œufs dans le même panier … donc faire dépendre l’électricité pour 75 % du nucléaire c’est trop !

Bon sens populaire d’un dicton contre bon sens tout court
« Ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier », chacun, enfant ou adulte, imagine bien l’image : une chute malencontreuse et une bonne partie des œufs se retrouve cassée.
Au sens figuré ça veut dire : faire dépendre d'une seule chose notre sort ou notre bonheur comporte un risque.
Mais cette maxime pleine de bon sens doit-elle être systématiquement appliquée ? A l’évidence non ! Seulement lorsqu‘un choix existe entre plusieurs solutions complémentaires et qu’il y a plus d’avantages que d’inconvénients à conserver plusieurs options. Quand un solide pont franchit une rivière il n’est pas utile de le doubler d’un bac pour la traverser.
D’ailleurs, qui d’entre nous utilise deux paniers pour ramener ses œufs du marché ?
Pourquoi le nucléaire devrait-il se plier au dicton, alors qu’abondent les contre-exemples où nous mettons précisément « nos œufs dans le même panier » ? Quelques exemples :

  • pratiquement tous les français préfèrent s’éclairer à l’électricité plutôt qu’à la bougie,
  • chaque ménage n’a souvent qu’un seul lave-linge, ou un seul lave-vaisselle (pas deux),
  • nous achetons pratiquement tous nos téléphones portables, nos ordinateurs et nos capteurs solaires en Asie,
  • en Norvège plus de 95% de l'électricité est produite par l'hydraulique, et plus de 80% au Brésil,
  • clin d’œil de la Nature, 100% de l'énergie reçue du Soleil par la Terre est d’origine nucléaire, etc.


L’électricité française est loin d’avoir ses « œufs dans le même panier »
D’abord, en 2019, hors 71 % de production électro-nucléaire, un bon quart provient de sources variées : hydraulique 11 %, combustibles fossiles 8 %, éolien 6 %, solaire 2 %, bioénergies 2 %.
Par ailleurs, avant l’arrêt des deux réacteurs nucléaires de Fessenheim en 2020 les 58 réacteurs français, loin d’être dans un seul « panier », se trouvaient éparpillés dans 19 paniers, les 19 centrales nucléaires du pays.
Chaque site fut choisi pour ses qualités spécifiques, variées et complémentaires. Aucune chance par exemple qu’un tsunami survenant au Blayais dans le Sud-Ouest ne coïncide avec un séisme frappant Fessenheim dans le Nord-Est, risquant de provoquer l’arrêt des deux centrales en même temps !
Bien sûr, il n’a pas échappé aux ingénieur(e)s du nucléaire qu’un risque générique, affectant tous les réacteurs du parc, puisse mettre ce dernier en difficulté. Effectivement ce risque, envisagé, s’est bel et bien produit. Plusieurs « maladies » ont affecté notre parc nucléaire. Elles ont toutes été éliminées au fur et à mesure, sans dommages, et en tout cas sans aucun accident ni impact sanitaire ou environnemental (remplacement des générateurs de vapeur et des couvercles de cuves, renforcement de la tenue au séisme, circuits de refroidissement supplémentaires, etc).
Grâce à la qualité des acteurs et des actrices de cette industrie, ces défauts génériques ont même contribué à renforcer la sûreté du parc, chaque remède étant appliqué systématiquement à tous les réacteurs, souvent en préventif, y compris à ceux n’ayant pas subi d’anomalie.
Rien, donc, ne justifie de réduire la part de la production électrique nucléaire de 75 % à 50 %.
Nous sommes d’autant plus éloignés des « œufs dans le même panier » que face au risque générique, le parc français possède en fait deux qualités :

(i) le démarrage des 58 réacteurs a été étalée sur 20 ans ce qui étala d’autant la possible survenue de « maladies de jeunesse » ou de défauts génériques,
(ii) nos réacteurs sont des REP (réacteurs à eau pressurisée) de 5 modèles différents (900 MW CP0, CP1 et CP2 ; 1300 MW ; 1450 MW) – et aucun n’est du type Tchernobyl ni du type Fukushima, ces derniers ayant été exclus des standards de sûreté retenus par nos industriels. La filière REP est aujourd’hui considérée comme la filière la plus performante et la plus sûre au monde ; comme en témoignent les milliers d’années de fonctionnement cumulé des plus de 300 REP en service et le choix de la majorité de ceux en construction dans le monde.

Bref, 19 centrales nucléaires hébergeant cinq modèles différents de réacteurs constituaient des « paniers » tellement robustes qu’il a fallu attendre la pulsion antinucléaire regrettable d’un Président (et de son successeur) pour en arriver à « casser » volontairement et avec préméditation les deux « oeufs » de Fessenheim, qui ne demandaient qu’à poursuivre intacts une longue carrière de production électrique pour le plus grand intérêt national, des consommateurs et du climat, dans le « panier » douillet de ses exploitants alsaciens, humiliés sans aucune raison technique, sécuritaire, économique ni climatique, au motif d’un vieux dicton servant de faux nez à deux Présidents.

Finalement 70-80 % d’électricité nucléaire n’est-il pas le bon équilibre ?
Cet outil « 75 % nucléaire » reste en tout cas une extraordinaire réussite nationale, industrielle, économique, sociale et environnementale, reconnue mondialement, accomplie par un petit pays, la France (1 % de la population mondiale), devenu champion de la transition écologique et de l’électricité inoffensive pour le climat dès 1990, et premier exportateur mondial d’électricité décarbonée.
Le plus grand bénéficiaire de cette poule aux œufs d’or nucléaire fut le citoyen consommateur qui bénéficia pendant 40 ans d’une électricité parmi les moins chères d’Europe, sans que la moindre taxe ne soit demandée aux contribuables (à la différence des actuels gouffres à milliards que sont les inutiles mais très à la mode kWh photovoltaïques et éoliens) et sans qu’aucun « gilet jaune » n’ait jamais eu besoin de descendre dans la rue pour demander du pouvoir d’achat.
Au passage, une certaine myopie écolo a cru voir dans la France un pays « tout nucléaire », ce qui revient aux « œufs dans le même panier »! Quelle erreur ! La réalité des chiffres est tout autre : gaz + pétrole + charbon représentent 70 % de notre énergie finale, l’électricité nucléaire seulement 16 % ! Il ne faut pas confondre énergie et électricité et oublier les impacts climatiques coupables de notre chauffage au gaz et de nos véhicules automobiles ! 70 % contre 16 %: la France est un pays « tout fossile », pas « tout nucléaire » ! Cette myopie de nos dirigeant explique l’échec de notre transition énergétique, la LTECV de 2015 s’étant attaquée à l’électricité, pourtant décarbonée à 93 % (grâce au nucléaire et à l’hydraulique), oubliant la partie immergée de l’iceberg fossile de nos émissions de CO2. Pire cette loi a encouragé l’importation de capteurs solaires photovoltaïques et d’éolien qui ne produisent que de … l’électricité ! Voilà l’erreur !

Mais alors, est-il pertinent de créer un « panier » de renouvelables intermittents ?
Le bon sens populaire comprend parfaitement le risque qu’il peut y avoir parfois à « mettre tous ses œufs dans le même panier ». Mais le même bon sens sait qu’une diversification n’est bénéfique que si le panier de rechange n’est pas percé et s’il apporte un mieux; or, quand il compare le nucléaire au solaire photovoltaïque ou à l’éolien le bon sens populaire constate que:

  1.  Photovoltaïque et éolien sont intermittents, pas le nucléaire (le « panier » solaire est percé toutes les nuits ; le « panier » éolien chute à chaque anticyclone).
  2.  Photovoltaïque et éolien occupent une énorme place dans nos paysages, environ 200 fois plus (à iso-énergie) que le nucléaire, bien plus protecteur de la biodiversité.
  3.  Photovoltaïque et éolien sont importés, pas le nucléaire dont plus de 95 % est fabriqué en France.
  4.  Photovoltaïque et éolien émettent plus de CO2 que le nucléaire (le solaire, importé de Chine, 10 fois plus !) 1
  5.  Photovoltaïque et éolien nécessitent de lourdes subventions et taxes (CSPE sur l’électricité, TICPE sur les carburants), pas le nucléaire dont le programme a été entièrement financé sur fonds propres et emprunts par l’industriel, qui a financé sa propre R&D et remboursé, par des redevances sur sa production, les recherches et développements financés sur fonds publics au CEA notamment.
  6.  L’électricité nucléaire française est 80 % moins chère pour le particulier que celle de nos amis allemands (et huit fois moins émettrice de CO2).
  7.  Le nucléaire est une des activités humaines dont les déchets sont les mieux gérés (voir la fiche « idée reçue » qui leur est dédiée ; espérons que les déchets des renouvelables sauront s’en inspirer).
  8.  Photovoltaïque et éolien nécessitent environ dix fois plus de matériaux et de ressources naturelles diverses par kWh produit que le nucléaire : socles béton, acier, cuivre, argent, mais aussi d’autres éléments plus rares comme le néodyme, le dysprosium, le sélénium, le tellure, le cadmium, l’indium etc. dont plus de 90 % de la réserve mondiale est détenue par la Chine, à la différence des mines d’uranium mieux réparties partout sur la planète.

Cette longue énumération n'a rien d'un acte de foi ni d'une idéologie; c’est une liste de faits démontrables (auditables) donc incontestables. Des faits, pas des opinions.


Pour conclure
Il est donc FAUX de dire « qu’il ne faut jamais mettre tous ses œufs dans le même panier ».
La théorie du « panier » ne doit pas devenir une religion ni une idéologie politique, même si elle a pu par le passé servir une magouille électorale d’un autre âge, que l’urgence climatique et notre économie affaiblie doivent aujourd’hui faire oublier.
L’établissement de la part de production électrique nucléaire autour de 75 % est l’aboutissement de plusieurs décisions éclairées, et de la volonté des Présidents De Gaulle, Pompidou et Giscard pour adapter notre système électrique au contexte énergétique international et aux besoins nationaux (le dernier « blackout » remonte au 19 décembre 1978). Cette place du nucléaire constitue une réussite incontestable pour notre pays, pour ses citoyens, son industrie et son indépendance. Après plus de 40 ans, au terme de 2000 années-réacteurs d’expérience, ces 75 % d’électricité nucléaire ont acquis leurs lettres de noblesse, sans rencontrer aucune contre-indication technique, économique, environnementale et climatique, ni de souveraineté nationale, gagnant aussi le pari de la sûreté et de l’exemplarité du traitement des déchets qui avaient cristallisé hier les craintes d’une génération  aujourd’hui objectivement rassurée.
Quant aux plus jeunes qui voient avec raison dans le nucléaire l’énergie d’avenir capable de vaincre le dérèglement climatique, gageons qu’après avoir qualifié d’écocide la funeste mise à l’arrêt des réacteurs de Fessenheim, sacrifiés en 2020 sur l’autel de l’écologie financière et politique, ils transmettent à nos dirigeants le courage qui leur manque pour que le nucléaire soit non pas réduit mais développé afin d’électrifier nos transports routiers et nos chauffages industriels et domestiques, dont les carburants et le gaz naturel sont responsables de trois quarts2 des émissions de CO2 de notre pays.
Nous sommes au pays de l’Accord de Paris sur le climat. Éliminons donc nos énergies fossiles (gaz naturel et essence en tête), pas notre électricité nucléaire. Sachons reconnaître nos erreurs de la LTECV de 2015. Les « 70-80 % d‘électricité nucléaire » ont fait leurs preuves depuis quatre décennies. Une telle part ne doit plus être ni un épouvantail ni l’enjeu de chantages électoraux ou européens, mais bel et bien un objectif qui permette la cohabitation efficace d’une large base énergétique sûre, pilotable, éprouvée, franco-française et n’émettant pas de CO2, avec un complément de renouvelables (hydraulique et ENRi). Ceci implique d’abroger la LTECV et de lancer rapidement les investissements nucléaires qui n’ont que trop tardé pour renouveler le parc.

 

1) Selon l’ADEME et les études sur le cycle complet de vie des énergies, le solaire photovoltaïque émet 56 grammes de CO2 par kWh électrique (gCO2/kWh), l’éolien 12 gCO2/kWh et le nucléaire made in France seulement 6gCO2/kWh (vieux chiffre d’avant l’arrêt d’EURODIF en 2012, en réalité 4gCO2/kWh aujourd’hui selon le Rapport Environnement d’EDF)
2) En France la production d’électricité ne représente que 6 % des émissions de CO2, et seulement 2 % sont attribuables à EDF. La loi LTECV de 2015 en s’attaquant à l’électricité s’est donc trompée de cible. Pire : le solaire et l’éolien encouragés à coup de milliards (qui profitent aux lobbies écologistes et gaziers mais pas au citoyen) ne produisent que de l’électricité ! Et intermittente en plus ! Notre première transition énergétique fut un succès, la seconde est un échec, sachons vite la corriger !

01/2021

UARGA : Union d'associations de retraités et d'anciens du nucléaire
Plan du site - Mentions légales