Vers une électricité durable. Propre, sans CO2, disponible, abondante en permanence
Contact Connexion adhérent Comment adhérer
Consommation et transformation d'énergie

Index
1. Introduction
2. Énergie primaire – Énergie secondaire – Transformation d’énergie
     2.1. Consommation d’énergie primaire
     2.2. Énergie secondaire – Cas de l’électricité
3. Évolution et prévision de la consommation d’énergie
     3.1. L’énergie primaire
     3.2. L’électricité
4. Conclusion

 

 

1. Introduction

Pendant des millénaires, fruits, gibier, puis céréales et plus généralement l’agriculture, ont été les sources d’énergie que l’homme a utilisées pour les transformer en force musculaire….et un peu en énergie cérébrale! Ce n’est qu’à une époque relativement récente qu’il a utilisé la force des animaux domestiques …ainsi que celles des esclaves lorsque des structures sociales plus élaborées le lui ont permis. Plus tardivement encore, l’usage des moulins d’abord, puis de la vapeur ont apporté à l’homme une capacité supérieure à sa seule force musculaire. Puis ce fut l’ère des combustibles fossiles, charbon d’abord puis pétrole et plus récemment gaz naturel. Ensuite, très récemment à l’échelle de l’évolution humaine, l’usage de l’énergie électrique a facilité le transport de l’énergie et son arrivée au point d’utilisation. Enfin, depuis à peine 50 ans, on a réussi à se dispenser des énergies fossiles pour produire de l’électricité[1], grâce à l’énergie nucléaire.

Une source d’énergie abondante et bon marché est, certes, la condition nécessaire du progrès et d’une certaine libération de l’homme, par la réduction de la pénibilité des tâches, la réduction de la durée et des risques du travail, ainsi que celles des risques sanitaires, mais jusqu’où peut-on aller? Les statistiques de durée moyenne de vie dans les différents pays du globe ont montré qu’il y a corrélation entre la durée moyenne de vie et la consommation d’énergie, au moins jusqu’à l’atteinte d’un minimum qui semble être aux alentours de 1,5 à 2 tep (tonnes équivalent pétrole) par habitant et par an (France 4,2 tep, Afrique 0,7 tep, États Unis 7,9).

 

2. Énergie primaire - Énergie secondaire – Transformation d’énergie

Les spécialistes distinguent généralement les sources ou formes d’énergies primaires et les énergies secondaires. Les énergies dites primaires sont celles qu’offre la Nature sans intervention humaine pour les créer. Ce sont donc le bois, les combustibles fossiles, l’énergie hydraulique, l’énergie géothermique, solaire ou éolienne, l’énergie de fission (et peut-être, un jour, de fusion) contenue dans le combustible nucléaire, etc. Les énergies secondaires sont le résultat d’une transformation apportée par l’homme à une énergie primairepour faciliter son utilisation; c’est le cas par exemple de l’électricité, de l’essence ou l’énergie thermique de la vapeur obtenue après combustion d’un combustible fossile, ou encore de l’hydrogène obtenu après craquage de l’eau (pour ce dernier, on dit souvent que c’est un vecteur d’énergie). Cette transformation s’effectue, dans tous les cas, avec un certain rendement, donc avec une certaine perte d’énergie. Pour un pays ou un groupe de pays donné, les consommations d’énergie primaire seront donc toujours supérieures à celles d’énergie secondaire, ces dernières reflétant mieux les besoins réels des populations, tandis que la connaissance des premières sera nécessaire pour la gestion des ressources à l’échelle du pays ou du globe.

On utilise quelquefois le terme «vecteur d’énergie» au lieu d’énergie secondaire; on trouve encore le terme «énergie finale» pour indiquer que c’est celle qui est finalement utilisée (pensez à l’essence ou tout autre fuel utilisé dans les transports, pensez à l’électricité, etc.)

Regardons d’abord comment ces énergies sont consommées:

  • suivant leur source,
  • d’un point de vue géographique, dans le monde, en Europe, en France, etc.
  • quels secteurs de l’économie consomment cette énergie.

La question des réserves, à l’échelle du globe ou d’un pays, est abordée dans la rubrique Ressources

On examinera particulièrement les tableaux qui suivent en essayant d’en tirer quelques enseignements.

 

2.1. La consommation d’énergie primaire

 

2.1.1. Répartition selon les sources d’énergie primaire

 

TABLEAU 1
CONSOMMATION D’ÉNERGIE PRIMAIRE DANS LE MONDE SELON LES SOURCES
(année 2004,source AIE, Agence Internationale de l’Énergie)

 

Pétrole

Charbon

Gaz

Nucléaire

Hydraulique

Biomasse -essentiel bois-

Autres Renouvelables

Mtep ou équivalent

3793

2775

2311

719

243

1172

44

Mt (millions de tonnes)

3300[2]

4162

1964

0,06
MtU

n.a.

2930

n.a.

TWh
Térawatts.heure(soit 109 kWh)

1169

6945

3420

2738

2809

ε

366

N.B. On rappelle que Mtep signifie millions de tonnes équivalent pétrole (Mtoe en anglais); approximativement 1Mtep = 1,5 Mtec (charbon) = 0,85 Mt de gaz naturel = 11,63 TWh d’électricité; ces valeurs d’équivalence sont celles recommandées par l’ONU pour effectuer des comparaisons.
MtU; millions de tonnes d’uranium. n.a.: non applicable

 

On notera:

  • la proportion importante des énergies des combustibles fossiles (plus de 80%)
  • le rôle plus que modeste des énergies renouvelables autres que l’hydraulique et la biomasse (dont plus de 95% est du bois de chauffage)

Quelques remarques sur l’évolution possible des tendances:

  • la part du pétrole plafonnera à plus ou moins court terme, quel que soit le désir de son utilisation, en raison de la limitation des capacités et la tendance à l’épuisement,
  • l’emploi du gaz devrait augmenter pendant encore quelque temps mais se trouver lui aussi borné quelques années après le pétrole,
  • le charbon peut voir sa part accrue surtout si des pays en plein développement (Chine, Inde) continuent d’y faire appel de manière massive. Cela risque de poser un problème environnemental sérieux tant que l’on n’aura pas trouvé de solution industrielle au devenir du CO2 émis. 

Il est par ailleurs difficile d’imaginer, à court et même moyen terme, une croissance importante des énergies renouvelables (solaire, éolien, géothermie) sauf peut-être en ce qui concerne le solaire thermiquepour le chauffage des habitations; et l’hydraulique est proche de son plafond! Quant au nucléaire, la taille des investissements et les délais de réalisation font que la croissance (souhaitable) de ce mode de production d’énergie ne peut être que progressive, même si les résistances sociétales s‘atténuent ou disparaissent.

Voilà, en termes simples, le problème posé au monde d’aujourd’hui. Tous ceux qui refusent de voir la réalité et se réfugient derrière des arguments fallacieux sur les potentialités des énergies renouvelables, celles des économies d’énergie, ou qui minimisent l’effet du CO2 sur le réchauffement de la planète, ne font que tromper l’opinion publique. Non seulement on aura besoin de toutes les énergies (y compris un développement important du nucléaire et les économies d’énergie), mais en plus il faudra apprendre à séquestrer le CO2 si on veut continuer à utiliser massivement le charbon.

Voyons maintenant qui consomme cette énergie

 

2.1.2. Répartition géographique de la consommation

 

TABLEAU 2
CONSOMMATION D’ÉNERGIE PRIMAIRE DANS QUELQUES PAYS OU GROUPES DE PAYS
(année 2004, source agence internationale de l’énergie)

ZONE

MONDE

OCDE

USA

EUROPE des 27

CHINE

AFRIQUE

FRANCE

Mtep

11059

5520

2460

2669

1625

586

260


TABLEAU 3
CONSOMMATION D’ÉNERGIE PRIMAIRE PAR HABITANT ET RAPPORTÉE AU PNB
(source ONU, key world energy statistics 2004)

ZONE

MONDE

OCDE

USA

EUROPE des 27

CHINE

AFRIQUE

FRANCE

tep/hab./an

1,77

4,73

7,9

4,0

1,25

0,67

4,2

kgep/$PNB
($ de l’année2000)

0,32

0,20

0,22

0,20

0,85

0,86

0,19

Ce tableau permet de comprendre que, durant les décennies à venir, la consommation mondiale d’énergie primaire ne peut que croître de manière importante. Si l’ensemble des pays consommait en moyenne 4tep/hab. (c’est la consommation actuelle européenne), la consommation mondiale serait supérieure de 225 %à celle que nous constatons en 2004!!

 

On constate – ce qui ne surprendra personne - que la consommation d’énergie primaire est extrêmement disparate selon les zones examinées. Le record de consommation individuelle (pour un grand pays, car quelques pays du Golfe Persique sont encore plus gourmands en énergie) est détenu par les Etats-Unis[3], tandis que la consommation est particulièrement faible en Afrique. On trouve le même reflet si l’on rapporte cette consommation au PNB des divers pays ou zones. On remarque d’ailleurs que la consommation, dans un premier temps, croît avec la valeur du PNB/hab. mais qu’elle tend ensuite vers une asymptote[4]. De toute manière, un grand nombre de pays représentant une population importante, voire majoritaire (la Chine + l’Inde représentent à elles seules 35% de la population mondiale en 2004), sont en pleine phase de développement et entrent dans une phase de croissance forte de leur consommation d’énergie.


 

2.1.3. Secteurs d’utilisation

Enfin, à quoi sert cette énergie? Elle est utilisée dans un grand nombre de secteurs de la vie courante ou industrielle, les transports, le chauffage etc. Il est intéressant d’en noter la répartition:

TABLEAU 4
SECTEURS D’UTILISATION DE L’ÉNERGIE PRIMAIRE - Exemple de la France
(source, observatoire de l’énergie 2005)

Secteur (% du total de consommation primaire)

Agriculture

Industrie

Tertiaire

Transports

Résidentiel

Alimentation

%

1,6

23,7

15

25,2

26

8,5

Notas: 1) La France consomme annuellement 260 Mtep d’énergie primaire, mais la consommation finale réelle n’est pourtant que de 170 Mtep, compte tenu des rendements pour obtenir l’énergie secondaire finalement utilisée, notamment l’électricité.

2) Les transports dépassent maintenant les besoins industriels, tandis que le résidentiel et tertiaire ont considérablement augmenté au cours des 30 dernières années. Noter la faible part de l’agriculture.

3) Dans le monde, selon l’ONU, 26,9% de la consommation en énergie primaire est utilisé par l’industrie, 25,8% par les transports, 8% pour l’agriculture, le restant (39,3%) étant pour le résidentiel et le tertiaire.

 

2.2. Énergie secondaire; cas de l’électricité

L’une des formes d’énergie secondaire les plus courantes parce que très simple d’utilisation, est l’énergie électrique. Elle présente des avantages indéniables de souplesse et de qualité environnementale, bien que présentant un certain nombre d’inconvénients:

  • elle ne se prête pas au stockage, du moins pas de manière importante et pratique, ce qui fait que, pour l’essentiel, le producteur doit «suivre» la demande en ajustant sa production en permanence en fonction de la demande instantanée; c’est la raison pour laquelle il faut avoir des capacités de production excédentaires pour pallier un pic imprévu de la demande ou l’absence inopinée de moyens de production et/ou de distribution, sous peine de pannes généralisées par «effet domino».
  • il faut l’amener au consommateur final (au contraire de l’essence pour laquelle c’est le consommateur qui se déplace vers la pompe de distribution), ce qui pose des problèmes d’investissement dans les cas d’habitats dispersés, voire environnementaux (lignes à haute tension),

la deuxième loi de la thermodynamique (principe de Carnot) conduit à des rendements faibles (35 à 45% selon les technologies) lorsque l’on passe de l’énergie primaire à la vapeur pour produire, via une turbine, l’électricité. Et quand on pense que, dans certains cas, on utilise l’électricité pour refaire de la chaleur pour du chauffage ou de la cuisson (même si dans ce cas le rendement est excellent)! 

 

TABLEAU 5
PRODUCTION D’ÉLECTRICITÉ(2004)
(source AIE)

ZONE

MONDE

OCDE

USA

EUROPE
des 27

CHINE

AFRIQUE

FRANCE

TWh

17450

10121

3920

2950

2234

1518

470

Nota:TWh, mille milliards de watt.heure ou 1 milliard de kWh

Il s’agit là de la production d’électricité, sachant que la conso mmation finale est d’environ 10% plus faible, compte tenu des pertes en ligne et la consommation interne des moyens de production. En outre il faut tenir compte du solde exportations/importations (cas de la France, nette exportatrice d’électricité)

 

TABLEAU 6
CONSOMMATION D’ÉLECTRICITÉ PAR HABITANT (2004)

(Source AIE)

ZONE

MONDE

OCDE

USA

EUROPE
des 27

CHINE

AFRIQUE

FRANCE

kWh/hab. et par an

2516

8204

13338

6565

1607

547

7689

On retrouve, de manière accentuée, la disparité de consommation constatée pour l’énergie primaire entre les zones géographiques tant pour ce qui est de la consommation totale que pour la consommation par habitant. L’ONU estime que près de deux milliards d’hommes n’avaient pas accès à l’électricité en 2004.

 

 

 

Enfin, voyons quelle est l’origine primaire de cette production d’électricité.

 

TABLEAU 7
ORIGINE PRIMAIRE DE LA PRODUCTION MONDIALE D’ÉLECTRICITÉ (2004)
(source, DGEMP, statistiques mondiales)

Énergie primaire

CHARBON

PÉTROLE

GAZ

HYDRAU
LIQUE

NUCLÉAIRE

SOLAIRE

ÉOLIEN et autres

%

39,8

6,7

19,6

16,1

15,7

ε

2,1

On constate qu’une fraction très importante (66%) de l’électricité consommée dans le monde reste produite à partir de combustibles fossiles. Si l’on tient compte, d’une part des rejets en CO2 qui en résultent et d’autre part du faible rendement de la conversion en énergie électrique, on ne peut qu’être réservé sur ce mode de production dans l’avenir.

En dehors de l’hydraulique et de certaines énergies renouvelables (solaire et éolien), l’électricité est produite par l’intermédiaire de la vapeur: c’est ce qui fait que, si la consommation mondiale en énergies primaires est de 11059 Mtep (en 2004), la consommation finale (énergie effectivement utilisée) n’est que de 7644 Mtep (69,1%). Cela est bien sûr une source d’erreurs et de confusion: regardez bien les hypothèses quand vous consultez des données publiées (c’est comme pour les contrats d’assurance: il faut bien lire les petits caractères!).

Pour l’électricité aussi, on a une situation analogue: si la production mondiale (en 2004) était de 17450 TWh, la consommation finale était de 15985 TWh (91,6%); la différence est due à l’électricité consommée par les organes de production et de distribution (centrales, transformateurs, etc.) et surtout aux pertes en ligne, haute, moyenne et basse tensions.

C’est pour essayer d’éviter de gâcher cette énergie primaire qui ne sert à rien, sauf à chauffer les petits oiseaux et les poissons, qu’ il y a beaucoup d’efforts de recherche en cours pour augmenter les rendements dans tous les domaines de la production et de la distributiond’énergie: les centrales au gaz et celles dites «combinées» participent à cet effort, comme d’ailleurs les programmes de R & D sur les réacteurs nucléaires de génération IV; dans tous les cas on veut s’affranchir des limites imposées par la deuxième loi de la thermodynamique qui limite le rendement pratique de production d’électricité à partir de vapeur aux alentours de 35- 40%; deux grandes voies sont suivies (elles ne sont pas incompatibles entre elles):

  • augmenter la température d’entrée de la turbine, ce qui impose vite de passer au gaz (hélium en général), en lieu et place de la vapeur,
  • utiliser le fluide de sortie de la turbine pour d’autres applications (chauffage, dessalement d’eau de mer, production d’hydrogène…), ce qui suppose que le moyen de production électrogène soit proche d’un utilisateur du fluide de sortie.

3. Évolution et prévision de la consommation d’énergie

Ainsi qu’on le constatera dans les tableaux qui suivent, les consommations d’énergies primaires et d’électricité, après une croissance continue dans les années passées, continueront à croître dans les décennies à venir, sauf perturbation majeure à l’échelle mondiale. La consommation d’électricité sera poussée, en particulier, par le développement de la concentration urbaine dans les pays en développement[5]. Cette croissance générale sera particulièrement soutenue par le développement des pays d’Asie ( Chine, Inde …) et d’Amérique du Sud (Brésil, Argentine). L’ONU table sur une croissance de la consommation électrique mondiale d’environ 2,5% par an.
A côté de cette tendance globale, le passé nous a enseigné que l’évolution de la consommation énergétique s’infléchissait au fur et à mesure que le pays accédait à un niveau de développement supérieur ; on le voit bien avec les évolutions 1973-2001 qui marquent une tendance au ralentissement de l’accroissement, surtout dans les pays développés. Il faut donc en tenir compte dans les prévisions à long terme, mais une grande partie de la population mondiale est encore loin de ce niveau.

 

3.1 L’énergie primaire

TABLEAU 8
EVOLUTION DE LA CONSOMMATION D’ÉNERGIE PRIMAIRE DANS LE MONDE DEPUIS 1973

La consommation mondiale d'énergie primaire : évolution depuis 1973


(1) Y compris les énergies renouvelables combustibles et les déchets pour les pays non OCDE.
(2) Europe OCDE, y compris la Pologne, la Hongrie et la République Tchèque.

Source : AIE/OCDE. Extrait des Chiffres-clés de l'énergie. Edition 2004. Observatoire de l'énergie.© Ministère de l'Économie, des Finances et de l'Industrie, 08/06/2004

 

Cet histogramme montre que l’Asie joue déjà un rôle primordial dans la croissance de la consommation mondiale d’énergie. Cet effet sera encore amplifié dans l’avenir, ainsi que le montre le tableau suivant; il existe, bien sûr, un grand nombre de prévisions dans lesquelles il n’est pas facile de se retrouver, et chacun sait que les économistes ne sont pas meilleurs que les météorologistes pour prévoir le futur; alors quand en plus on y mêle des considérations politiques ou idéologiques….

Dans le tableau suivant, on s’appuie sur le «Reference Scenario» de l’AIE qui prend en compte une croissance rapide dans les pays émergents et beaucoup plus lente dans les pays de l’OCDE[6]:

 

TABLEAU 9
RÉPARTITION DE LA CONSOMMATION D’ ÉNERGIE MONDIALE SUR LES 30 PROCHAINES ANNÉES

MONDE
Mtep

OCDE

ASIE dont CHINE

AMÉRIQUE LATINE

AFRIQUE

AUTRES

2000

10600

50,1%

25,2%

4,3%

5,3%

15,1%

2010

12200

47,7%

26,7%

4,5%

5,4%

15,7%

2030

16500

41,2%

31,1%

5,5%

6,4%

16,8%

 

 

Revenons sur les difficultés de prévisions d’évolution des consommations en énergies primaires: si l’évolution des consommations dans le passé est du domaine de la certitude, pour l’avenir, seules sont permises des conjectures qui supposent, de manière plus ou moins implicite, des hypothèses sur l’évolution politico-économique des différents pays. Comme nous l’avons dit, le passé montre que les spécialistes se sont souvent trompés. A titre d’exemple dans un domaine qu’on connaît bien, on se rappellera les prévisions de consommation d’uranium faites dans les années 70, alors que son prix avoisinait les $40 la livre d’U3O8 et combien ces prévisions furent démenties à la suite du «contre-choc» pétrolier et des accidents de Three Mile Island et Tchernobyl, avec un prix tombé à moins de $8 la livre durant toutes les années 90.

On pourrait ainsi multiplier les exemples et cela doit nous inciter à une grande prudence quand on veut faire des prévisions sur l’avenir, même à moyen terme.

En outre de telles prévisions sont encore plus délicates lorsque les conditions politico-économiques qui gouvernent le sujet sont très fluctuantes. C’est ce qui arrive avec la source d’énergie constituée par le pétrole (et le gaz naturel qui suit, avec un certain décalage, les prix du pétrole) dont le prix est éminemment incertain comme en témoigne le tableau ci-dessous et comme chacun peut le vérifier à la pompe. On peut comprendre que de telles évolutions influent sur le développement économique en général et, donc, en particulier, sur l’évolution de la consommation d’énergie.

 

TABLEAU 10
Evolution du cours du pétrole et du $ sur les dix dernières années
(au 1er janvier des années citées)

1996

1998

2000

2002

2004

2006

BRENT $/BARIL(arrondi)

18

14

28

18

32

61

$US en F puis en €

4.99 F

5.12 F

5.84 F

0.90 €

0.84 €

0.79 €

(source BP)

Il est néanmoins indispensable de tenter d’établir des scénarios prévisionnels, ne serait-ce que pour orienter les décisions d’investissementspour les outils de production et de distribution, et peser par le biais des incitations et des taxes sur les habitudes des consommateurs. Voici, à titre d’exemple, car on en trouve beaucoup d’autres, une prévision d’évolution de la consommation d’énergie dans le monde et de répartition selon les différentes sources.

 

TABLEAU 11
UNE VISION D’ÉVOLUTION DE LA CONSOMMATION ÉNERGETIQUE MONDIALE
(P.L.Bauquis, Groupe Total, hors bois de chauffage)

Années

Pétrole

Gaz

Charbon

Nucléaire

Renouvelables(dont hydraul.)

Total(Mtep)

2000

40%

22%

24%

6,5%

7,5%

9,3

2020

40%

27%

20%

6,5%

6,5%

14

2050

20%

25%

25%

22%

8%

18


On a pu constater dans les pays industrialisés une croissance très rapide de la consommation accompagnant le progrès industriel et l’amélioration des conditions de vie des populations puis un infléchissement significatif de cette croissance à mesure que les conditions et les rendements industriels ont progressé. C’est évidemment à l’échelle mondiale qu’il faut considérer cette évolution dans l’avenir mais l’évolution de la consommation française est assez représentative de ce qui s’est passé dans les pays de développement industriel ancien. On trouve le même type d’évolution aux États Unis et l’on peut remarquer que les pays venus plus tard au plein développement industriel atteignent la zone d’infléchissement plus tôt, bénéficiant plus immédiatement des progrès déjà accomplis, par exemple, dans l’utilisation de l’énergie. Un grand nombre de pays sont encore très loin de ce stade (la consommation moyenne par habitant dans le monde est de 40 % de celle de l’Europe et de 22 % de celle des États Unis qui n’est certes pas un modèle d’absence de gaspillage d’énergie). Les prévisions actuelles font apparaître une consommation d’énergie (et d’électricité) qui reste en forte croissance pour les années à venir et qui, par conséquent, nécessite de trouver des solutions adaptées.

Il ne fait pas de doute que tous les états devraient prendre des mesures incitatives fortes pour favoriser les économies d’énergie dans tous les domaines, ne serait-ce que pour stabiliser, voire diminuer, les rejets de gaz à effet de serre.

 

3.2. L’électricité

TABLEAU 12
PREVISION DE L’EVOLUTION DE LA CONSOMMATION D’ELECTRICITE (TWh)
(source DOE)

Années

2000

2005

2010

2015

2020

2025

Pays industrialisés

7600

8800

9400

10300

11200

12000

Pays en voie de développement

4100

5000

6100

7600

9100

10800

Pays de l’ex bloc de l’Est

1800

1900

1950

2000

2200

2900

Total

13500

15700

17450

19900

22500

26700

Nota: il s’agit là de la consommation finale, hors pertes dues au transport de l’électricité; pour avoir l’équivalent en production nécessaire d’électricité, ajouter, en gros, 10%.

 

On voit que dans moins de dix ans la consommation électrique atteindra 20 000 TWh, soit une augmentation de 25%; à ce rythme, le doublement de la consommation électrique de 2004 sera atteint en 25 ans, ce qui suppose des investissements de production énormes, comme l’a récemment reconnu la Commission Européenne de Bruxelles, après la panne du 4 novembre 2006. On voit d’ailleurs se mettre en place ces investissements en Asie (barrages des Trois-Gorges, centrales nucléaires dans toute l’Asie du Sud-Est) Mais la progression devra être telle qu’elle apportera certainement des évolutions importantes et techniques et comportementales.

 

4. Conclusion

On ne s’étonnera pas de ce que les formes de travail les plus contraignantes existent généralement dans les pays où la consommation d’énergie est la moins développée. On a même corrélé de manière claire la consommation d’électricité et l’état sanitaire d’un pays: le taux de mortalité infantile croît au-dessous de 500 W/habitant, l’espérance de vie diminue brusquement au-dessous de 180 W/habitant. Compte tenu de la mondialisation croissante de l’information, il sera de plus en plus difficile de voir maintenues de très larges disparités sauf à risquer des conflits lourds pour le contrôle des ressources énergétiques. Est-ce d’ailleurs encore un risque ou déjà une réalité? (impact majeur de la consommation chinoise, tous les problèmes au Moyen-Orient, certains conflits en Afrique…)

Pour que les Chinois, les Indiens et les Indonésiens accèdent à une consommation de niveau européen, la consommation mondiale doit être multipliée au moins par deux. On comprend sans peine que cette question soit l’une des plus importantes que nos sociétés aient à résoudre dans les décennies prochaines. Comment augmenter de manière acceptable et durable la production d’énergie mondiale ? Quelles sources retenir ? notamment sans mettre en péril l’environnement. Utiliser l’énergie avec modération s’imposera de plus en plus mais il serait mal venu de recommander d’économiser l’énergie à ceux qui, aujourd’hui, n’en disposent même pas. La stratégie future devra assurer une croissance de la consommation en évaluant les capacités et les risques des diverses solutions, par exemple,

  • pour choisir entre, d’une part l’utilisation des combustibles fossiles ou de la biomasse avec l’inconvénient de la production de CO2 et du réchauffement de la planète et d’autre part le développement d’une production nucléaire, seule capable aujourd’hui de répondre à l’accroissement de la demande sans augmentation des rejets de CO2, mais avec une maîtrise convenable de la sûreté et des questions liées aux déchets (et surtout perçue comme telle),
  • pour décider aussi du niveau de R&D et d’investissements consacrés au développement de techniques nouvelles après avoir correctement évalué leur possibilité à répondre à tout ou partie du défi énergétique: énergies renouvelables[7], filière hydrogène et plus généralement stockage de l’énergie, moyens de transport sans rejet de CO2, économies d’énergie, etc.

C’est seulement au prix d’une évolution raisonnable de la consommation d’énergie, accompagnée de moyens de production cohérents et acceptés au niveau mondial, que notre planète trouvera le chemin du développement durable[8].

 

ABK-PhF  11/12/2006
 

 

[1]Tout au moins à grande échelle, car l’hydroélectricité existe depuis plus de 50 ans.
[2]Certains pourront s’étonner que cette valeur ne soit pas identique à celle immédiatement au-dessus ; c’est que pour des questions de normalisation et comparaison avec les autres combustibles, la tep retenue par les instances internationales est la masse d’un pétrole théorique assez lourd alors qu’aujourd’hui beaucoup de pétroles plus légers sont extraits (notamment au Moyen Orient).
[3]Consommation d’énergie primaire aux USA en 2004 : 2460 Mtep dont près de 30% pour produire 3920 TWh d’électricité (cette production atteindra 4300 TWh en 2020)
[4]-Le Monde-25/01/2000- La nouvelle économie protège l’environnement. Enquête parue en 12/99 de Global & Technology Foundation. De 97 à 2007, l’intensité énergétique (définie comme étant la consommation d‘énergie par $ de PIB) américaine va baisser de 1,5 à 2% (de 20000 BTU/$1992 de PIB dans les années 50, elle est passée à 12500 en 1997). La croissance [de l’économie, ndr] provient de l’informatique et des nouvelles technologies, peu consommatrices d’énergie. Des logiciels optimisent la consommation d’énergie des ménages, le commerce électronique économise en magasins et transports, (ex. vente d’un livre en librairie traditionnelle : 0.44$ de consommation énergétique pour 100$ de vente, par Amazon.com, 0.03$), moins de papier, etc.

[5]Qu’on le trouve ou non souhaitable, il apparaît inéluctable que, dans les prochaines décennies, les concentrations urbaines continuent de se développer. On peut penser, avec l’ONU, qu’en 2020 près de 55% de la population mondiale sera concentrée dans les grandes villes. C’est une caractéristique dont il faut tenir compte dans les plans de développement des moyens de production énergétique. D’abord parce qu’un habitant en ville consomme 2 fois plus d’énergie que s’il habite en campagne et ensuite parce qu’une mégapole nécessite la constitution de sources d’énergie très puissantes sur une petite surface; Paris et sa banlieue, par exemple, nécessitent de fournir (hors transports) l’équivalent de 25 Mtep dont l’essentiel en électricité et en gaz pour une surface de moins de 500 km2.

[6]Ce que l’AIE appelle «Reference Scenario», c’est, grosso modo, une poursuite des politiques actuelles; dans le cas de la mise en place de politiques volontaristes («Alternative Scenario» selon l’AIE), la consommation mondiale en 2030 serait de 14500 Mtep au lieu de 16500, comme indiqué dans le tableau; mais cela ne change guère la répartition indiquée, mais au contraire amplifie la chute de la part des pays de l’OCDE.
[7]Pour ceux qui seraient intéressés, on trouvera, dans la rubrique Energie de ce site des données sur les potentialités des énergies renouvelables
[8]Si on suit les calculs de la WWF (World Wildlife Foundation – Fonds mondial pour la Nature), il faudrait un équivalent de 2,23 hectares par Terrien pour produire les ressources qu’il consomme aujourd’hui (eau, énergie, aliments) et absorber ses déchets, alors que la capacité de la Terre n’est que de 1,8 ha par habitant, ce qui tend à prouver soit qu’il y a trop de Terriens, soit qu’ils consomment trop. Ces mêmes calculs montrent qu’un américain a besoin de 9,6 ha, un français de 5,6 ha alors qu’un afghan ne disposerait que de 0,1 ha. WWF en déduit que l’Humanité vit au dessus de ses moyens.

 


 

    UARGA : Union d'associations de retraités et d'anciens du nucléaire
    Plan du site - Mentions légales