Index
1. Généralités
2. Description du réacteur EPR
2.1. L’enceinte de confinement
2.2. Le coeur
2.3. La cuve
2.4. Les circuits primaires
2.5. Les turbo-alternateurs
2.6. Contrôle commande et sûreté
3. Conclusion
4. Compléments
Réacteur EPR de Flamanville (en blanc, au premier plan) |
Dans la période de récession du nucléaire qui a marqué la fin des années 1980, les producteurs d’électricité français et allemands, à la demande des constructeurs associés Framatome et Siemens-KWU, ont convenu de lancer un projet commun de réacteur adapté à leurs besoins futurs et recevable par les autorités de sûreté des deux nations (ultérieurement, Siemens s’est désengagée du projet suite à la décision du gouvernement allemand – prise au lendemain de l’accident de Fukushima - d’abandonner l’énergie électronucléaire).
Aujourd’hui, Framatome conduit seule le projet avec ses clients : EDF (Flamanville 3), l’électricien chinois CGNPC (Taishan) et l’électricien finlandais TVO (Olkiluoto). Un autre projet est en cours à Hinkley Point en Grande Bretagne (2 réacteurs) dont la maîtrise d’œuvre est assurée par EDF et son partenaire chinois CGN.
En France, un projet de construction de 3 paires d’EPR est envisagé (en 2021) avec Penly comme premier site probable pour recevoir la première paire d’EPR.
.
Le projet EPR fut lancé en 1992, dans un souci d’utiliser toute l’expérience acquise sur les modèles de REP précédents et surtout les modèles français N4 et allemand Konvoi. C’est donc un projet « évolutionnaire », dit de 3ème génération, dans un esprit différent de ce qui fera l’objet du programme international « Génération IV » sur les réacteurs de l’avenir. Fin 1998, les études d’optimisation du projet étaient achevées, et le Conseil Économique et Social plaidait pour une décision rapide de lancement de la réalisation, que le Président d’EDF, François ROUSSELY, voyait intervenir au mieux 12 à 18 mois plus tard.
Le principal objectif de l’EPR est d’augmenter significativement la sûreté du réacteur tout en maintenant le coût de sa production aussi bas que possible. C’est donc à ce jour le plus gros réacteur électronucléaire au monde – pour minimiser son coût de production – et sans doute celui qui a le plus rehaussé la sûreté d’exploitation.
La conception a intégré le retour d’expérience (REX) de milliers d’années d’exploitation des réacteurs électronucléaires (déjà largement intégré sur le N4), en y ajoutant des contraintes majeures :
- la prévention d’un accident de fusion du cœur, visant à éviter un relâchement de radioactivité à l’extérieur de l’enceinte de confinement. ;
- une meilleure robustesse vis-à-vis des agressions internes (incendie, inondation, explosion, projectile…) ou externes (séisme, chute d’avion, explosion, conditions climatiques extrêmes…).
- une meilleure redondance, de diversification et séparation physique des systèmes de sauvegarde,
D’autres objectifs ont été pris en compte : une disponibilité améliorée, une économie des matières nucléaires, une moindre production de déchets… et d’autres encore.
Ces innovations se traduisent principalement sur l'agencement des différentes fonctions de la centrale, avec des dispositions favorables à une sûreté encore améliorée. Le bâtiment central (double enceinte étanche en béton avec liner en acier) est entouré de quatre bâtiments indépendants abritant chacun une partie des équipements de sûreté. Les moyens électriques de secours sont séparés en deux voies indépendantes.
En cas de fusion du cœur, un dispositif de collecte du « corium » (mélange résultant de la fusion du combustible et de métal des structures internes de la cuve) est prévu (voir ci-après).
2. Description du réacteur EPR
2.1. L’enceinte de confinement
Schéma du récupérateur de corium Cliquer pour agrandir (Source IRSN) |
L’enceinte de confinement est à double paroi (comme sur le N4), mais avec une peau d’étanchéité en acier (le liner). Elle est renforcée et plus épaisse pour supporter l'impact d'un avion commercial.
Elle comprend, en partie basse, sous la cuve, un système de récupération et de refroidissement du corium en cas de fusion du cœur. On peut considérer que c’est la principale amélioration apportée à la sûreté du REP (qui sera adaptée sur les autres REP français dans le cadre du grand carénage en cours).
Il est situé sous le réacteur, et une chambre d’étalement du corium est aménagée à proximité où il serait refroidi.
La forme globale du cœur, plus large, favorise une meilleure économie des neutrons. Les assemblages sont semblables à ceux du projet N4, mais leur nombre est porté à 241 (205 pour le N4), ce qui, pour le niveau de puissance choisie (4324 MWth) entraîne une diminution de la puissance linéique du combustible (155 W/cm au lieu de 179,6 pour le N4), offrant une marge de fonctionnement plus grande : soit pour le choix de la puissance totale qui peut être de 4300 MWth (réacteur finlandais) ou 4500 MWth (réacteur français), soit pour les modes de gestion et de rechargement du combustible. Plusieurs modes de gestion sont possibles, la durée du cycle entre deux chargements peut aller de 12 à 24 mois. L’emploi de combustible au plutonium (MOX) est possible à 100% (sauf pour les premiers cycles de chargements).
L’assemblage contient 265 crayons combustibles et 24 tubes guides pour les crayons absorbants. Il n’y a pas de tube central pour l’instrumentation du cœur. Cette dernière est assurée par des équipements portés par le couvercle du réacteur, à l’inverse de l’instrumentation mise en œuvre dans les paliers précédents passant par le fond de la cuve. Cette nouvelle disposition a été expérimentée avec succès sur le réacteur allemand Konvoi. Elle est considérée plus sûre parce qu’elle diminue le risque de fuite en partie basse de la cuve, mais complique considérablement la réalisation du couvercle qui est constellé de traversées.
Le cœur est entouré par un réflecteur de neutrons réalisé par des blocs d’acier inoxydable de 20 cm d’épaisseur moyenne. Ce réflecteur lourd est inséré entre les assemblages périphériques et l’enveloppe de cœur. Il apporte une forte réduction du flux de neutrons vers la cuve, ce qui en augmente sa longévité, et une meilleure répartition de la puissance dans le cœur due à la réflexion des neutrons vers le cœur. Le moindre flux neutronique sur la cuve aura permis, dès la phase de conception, de prendre en compte une durée de vie de du réacteur à 60 ans, sans préjudice des visites décennales qui restent la doctrine de base en matière d’autorisation de fonctionnement.
En partie courante, le diamètre intérieur atteint près de 4,9 mètres (4,5 m pour le N4). Le fond inférieur est simplifié par rapport au projet N4 par la suppression des traversées d’instrumentation. Par contre, la virole de supportage des traversées d’eau assure aussi le supportage du couvercle de cuve : ceci en fait une pièce forgée de dimension exceptionnelle.
Le couvercle reçoit les 89 mécanismes de commande des barres absorbantes (73 sur le N4), mais aussi les dispositifs d’instrumentation du cœur, selon le concept Konvoi.
Leur dimensionnement est adapté à la puissance à transférer par extrapolation des composants du palier N4.
Pour les pompes, l’extrapolation est simple, mais un dispositif de sécurité a été rajouté pour améliorer l’étanchéité à l’arrêt en cas d’accident grave.
Pour les générateurs de vapeur, diverses dispositions ont été apportées pour améliorer la qualité de la vapeur, le rendement, ou la sûreté en cas d’accident, par exemple en augmentant la réserve d’eau contenue dans le ballon de vapeur. Cette disposition augmente le délai disponible pour le refroidissement du cœur en cas de perte des circuits d’eau.
Pour le pressuriseur, son volume est augmenté de 25% pour réduire les transitoires thermiques lors des variations de charge, et ainsi augmenter la longévité de la tranche. D’autres modifications plus modestes visent à simplifier les travaux d’entretien.
Ce composant est modestement extrapolé de celui qui équipe le palier N4, au moins pour la tête de série. Il en est de même du poste d’eau qui en assure le service. Là, comme ailleurs, le projet N4 est d’un apport précieux.
2.6. Contrôle commande et sûreté
Les mécanismes de commande des grappes absorbantes sont au nombre de 89, fixés sur le couvercle de cuve. Le modèle retenu est celui du Konvoi, plus compact que celui du palier N4. Le couvercle de cuve doit également supporter les dispositifs d’instrumentation du cœur, (concept du Konvoi) ce qui l’encombre déjà beaucoup. Comme dans le projet N4, le contrôle-commande est totalement informatisé, afin de permettre à l’exploitant une connaissance rapide de l’état du réacteur à tout moment, avec une assistance dans l’analyse des éventuelles défaillances.
De nombreuses dispositions sur les équipements secourus visent à réduire d’un facteur 10 par rapport au palier précédent le risque d’un accident grave.
Le projet EPR arrive au moment où le remplacement d’un grand nombre de réacteurs des première et seconde générations doit intervenir dans le monde nucléaire occidental. Le choix d’un concept évolutionnaire basé sur les expériences accumulées de plus de 11.000 année-réacteur augmente considérablement ses chances d’une insertion rapide dans les réseaux des électriciens.
Retour d’expérience d’Olkiluoto à Taishan 1&2 - Point au 1er février 2014 (origine ARA-SGN)
02/2021